Les ministres péquistes n’ont pas été très loquaces au sujet des études sur la langue de travail dévoilées mardi par l’Office québécois de la langue française. Et pour cause : ils doivent livrer une nouvelle loi 101 dans un temps record, « avant les fêtes ». Si les chiffres ne cessent de leur indiquer qu’un tel renforcement est nécessaire, ils se savent minoritaires… à plus d’un égard.
Le ministre responsable de la métropole, Jean-François Lisée, s’abstenant de commenter les chiffres de l’OQLF, a déclaré : « Nous allons laisser parler le rapport. » Les mauvaises langues s’en sont amusées, étant donné le caractère prolixe de l’homme.
Le communiqué de la ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane De Courcy, était empreint de la même extrême prudence et coiffé d’un titre en forme de citation : « Ces études confirment ce qu’on dit les travailleurs et travailleuses que nous avons rencontrés sur le terrain. »
Tout au plus faisait-elle remarquer que les études sur la langue du travail de l’OQLF indiquent que l’utilisation du français « a diminué au cours des dernières années ». Dans le couloir, à l’entrée du caucus péquiste, elle s’est abstenue de tout commentaire chargé de sens.
L’attitude des ministres s’explique : la première ministre Pauline Marois a promis de livrer « avant les Fêtes » (selon les termes utilisés dans le communiqué de Mme De Courcy) une nouvelle mouture de la Charte de la langue française. Or, le programme du Parti québécois était clair : il promettait d’étendre « graduellement les dispositions déjà existantes appliquées aux entreprises de plus de 49 employés aux entreprises comptant de 11 à 49 employés ». Entre autres. Mais le gouvernement élu le 4 septembre a un statut minoritaire et n’a pas toute la marge de manoeuvre pour faire ce qu’il souhaite.
Pourtant, les chiffres dévoilés par l’OQLF mardi ont de quoi inquiéter et font comprendre qu’on ne pourra éternellement repousser la refonte et le renforcement de la loi 101. Comme toujours en ces matières, le portrait comporte des teintes de gris. Et quelques aspects encourageants.
Une progression nette de l’utilisation du français au travail par les allophones, par exemple. Le pourcentage est passé de 42 % en 1971 à 63 % en 1989. Ce bond, on le doit à la première loi 101. Pour l’autre période étudiée par l’organisme, de 1989 à 2010, la progression est bien plus modeste, passant de 63 % en 1989 à 68 % en 2010.
Au reste, le bilinguisme est « très présent », notamment dans la région de Montréal. Chez les francophones de la région métropolitaine de Montréal travaillant dans le secteur privé, l’utilisation principale du français avait beaucoup augmenté de 1971 à 1989, passant de 88 % à 93 %. Mais en 2010, l’Office constate un retour à une proportion comparable à celle de 1971, 87 %.
Ces chiffres confirment au fond ce que l’on constate quotidiennement dans la région de Montréal. Il y a des services en français, certes, mais il s’agit souvent d’une langue de devanture. Derrière le comptoir, on échange en anglais, on travaille en anglais. L’État québécois lui-même a été surpris, ces dernières années, à offrir systématiquement des services bilingues.
L’exemple vient de haut : lors de moments forts et publics comme la démission des maires de Montréal et de Laval, on trouva tout à fait normal que tous les discours soient symétriquement et absolument bilingues. On en vient parfois à douter que la seule langue officielle du Québec soit encore le français.
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