Pour une réelle majorité

Depuis le dernier référendum, deux problèmes existentiels persistent au sein de notre société : le "vote ethnique" utilisé pour masquer notre indécision collective et l'anglophilie inavouée de plusieurs...

Tribune libre 2010

On vit en ce moment une période très mauvaise en ce qui concerne
notre projet d'indépendance du Québec en raison de deux choses :
l'américanisation (entendre l'anglophilie)mal avouée de plusieurs d'entre
nous et le fait de blâmer les immigrants pour la défaite du dernier
référendum.
Premièrement, il faut se mettre en tête que même si le vote pour
le non aurait pu gagner quelques points grâce à ceux-ci,on aurait resté une
société indécise malgré tout, sans même la souveraineté automatiquement
assurée:avoir gagné à 51%, ça aurait voulu dire 49% de la population avec
qui Ottawa aurait pu jouer sur la peur pour finalement rendre invalide ce
vote au nom de la sécurité publique ou tout autre mesure politique.
Un
peuple voulant l'indépendance doit réellement la voter majoritairement,non
pas avec 50% de refus/indécis, donc n'ayant pas peur des 1 ou 2% allant à
l'adversaire.En leur temps, les Irlandais et les Américains voulurent
majoritairement l'indépendance des Britanniques et l'ont obtenu,comme
plusieurs autres peuples.
Si on blâme les milliers immigrants qui auraient
effectivement contribué au 1% additionnel du non, c'est admettre qu'on
avait besoin d'eux, nous, millions de Québécois, pour compenser notre
indécision. Pire, ce qu'on n'arrive pas à admettre, c'est qu'une grande
partie de notre société "baigne" dans l'anglophilie à l'américaine: notre
musique, notre culture populaire et nos idoles sont majoritairement
américains, les mots anglais glissés au milieu d'une conversation en
français sont à la mode, le tout sans même soulever de grandes
protestations de notre part.
Le meilleur exemple de ce problème est que,
même si elle passe pour la région la plus nationaliste et que c'est là où
il y a eu le plus de réactions face au cas des accommodements raisonnables
(à Montréal), c'est la région de la ville de Québec qui a voté le plus pour
les Conservateurs durant la dernière élection et qui accueille à bras
ouvert les navires et les avions de l'armée américaine lors des festivals
militaires et ce, sans aucune protestation des citoyens.
Là est notre
problème présent : en raison de l'américanisation et de l'anglophilie de
plusieurs, on n'arrive plus à admettre que l'indépendance n'en tient qu'à
nous, non à d'autres, d'où cette raison de blâmer les immigrants pour notre
manque d'action et de volonté. Il faut mettre de côté cette impression
"d'envahisseur" et de "collaborateur avec l'ennemi" lorsqu'il s'agit
d'inclure les immigrants dans la question sur la souveraineté : ceux-ci,
contrairement à d'autres, ne sont pas venus clandestinement par bateau
comme en Europe et n'ont pas traversé la frontière illégalement comme aux
États-Unis. L'immense majorité d'entre eux a fait une demande à Immigration
Canada qui fut acceptée,rien de plus.
Jeter le blâme sur les immigrants
pour notre manque de résolution collective durant un événement crucial qui
s'est passé il y 15 ans et les traiter de "traître" pour une défaite alors
que plusieurs d'entre eux n'étaient encore que des jeunes dans leur pays
d'origine, c'est jouer le jeu de la propagande Canadienne-Anglaise à notre
sujet, c'est-à-dire projeter l'image d'un peuple raciste et hostile, où le
Canadien-Anglais aura toujours l'air d'être plus accueillant, avec lequel le
nouvel arrivant voudra alors vivre, donc probablement s'intégrer à sa
communauté à la place de la nôtre.
Vouloir réellement la souveraineté, c'est
la vouloir majoritairement, pas à moitié plus 1%. La vouloir
réellement,c'est aussi regarder vers l'avant, avec des idées pouvant gagner
l'appui de la majorité de notre peuple et laisser derrière 15 ans de
frustrations et de recherche de boucs-émissaires ne menant pratiquement à
rien.
C'est aussi vouloir un nouveau référendum dans lequel l'excuse du
"vote ethnique" n'aura plus sa place en raison d'une résolution collective
et réellement majoritaire, que l'on aura transmise même à "nos" immigrants
en question, par la communication des projets et des idées dans le respect
et sans préjugés, comme pour le reste de nos concitoyens, reconnaissant
qu'eux-aussi peuvent également faire preuve de jugement personnel et
éclairé et partager notre projet de société.
Pour conclure, c'est admettre
également qu'il faudra, avant tout, faire un grand examen de conscience tant
personnelle que collective, où il faudra reconnaître l'emprise et les
dégâts que cette américanisation et cette anglophilie si insidieuses ont pu
causer sur nos projets et nos idées, abandonner notre immobilisme critique
et, comme nos adversaires le font, regagner viser L'ENSEMBLE de la
population.
Auteur : Yannick St-Jacques


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juin 2010

    Vous confondez la cause et la conséquence.
    L'anglophilie existe.Mais ici,au Québec,elle est la conséquence d'une situation bloquée.
    Qu'il soit électoral ou référendaire,le vote de la minorité de blocage s'exerce de façon constante à l'encontre du peuple québécois depuis très longtemps.Et cette minorité ne se perçoit pas comme une minorité,mais l'avancée de la majorité canadienne(anglaise).
    Votre façon de blâmer le peuple québécois pour son manque de fermeté passe bien trop facilement sous silence qu'il n'est pas sain pour notre démocratie qu'une minorité bloque le jeu normal des partis.C'est très longtemps avant la venue des séparatistes que la minorité anglo a voté libéral de façon systématique.Si un chat est un chat,il faut l'appeler un chat.Il faut commencer par appeler un vote ethnique un vote ethnique.Et si ce vote Nous est hostile,il faut donc commencer par dire les choses : il s'agit d'un vote hostile,légal et légitime tant que vous voudrez,mais hostile.
    Un immigrant n'est pas "hostile".Mais un million de nouveaux arrivants de première et deuxième génération seront capables de faire un vote"hostile"
    D'autre part,dans les sociétés modernes--nous ne sommes plus au 19 ieme siècle--les écarts aux élections ou aux référendums ne sont jamais grands.