The Montreal Canadians

La nomination d'un entraîneur unilingue anglais, qui fait tant réagir, n'est que la suite d'une longue liste de signaux de mépris de cette compagnie à l'endroit de sa clientèle.

CH — boycott des produits Molson

Il y a un bon moment qu'il me vient, de temps à autre, l'envie d'écrire
sur les Montreal Canadians. Chaque fois, je me dis : pourquoi ferais-je de
la publicité à cette business arrogante qui se fout de ma gueule à longueur d'année avec sa grosse musique top-forty américaine à 99,9%, ses
annonces-maison désespérément bilingues tout droit sorties des beaux jours
de la suprématie anglo-montréalaise, et surtout, surtout, l'invraisemblable
proportion famélique de joueurs québécois qu'elle daigne jeter en pâture
aux indigènes de la même espèce, qui la font vivre grassement ?

Mais, ne serait-ce que pour rendre hommage à Pierre Curzi qui s'est
aventuré sur ce sujet il n'y a pas si longtemps, il est temps de redire ce
qu'il disait lui-même : Cette entreprise ressemble à une formidable machine
à fabriquer de l'anti-fierté québécoise, qui tourne à plein régime,
vingt-quatre heures par jour, sept jours sur sept,
trois-cent-soixante-cinq jours par année depuis des années, dont on a
l'impression qu'elle voudrait former, à partir même du plus jeune âge, des
hordes de potentiels colonisés satisfaits.

Il faut entendre ce que disent certains admirateurs du Canadien, et même
des experts bien en vue, pour excuser l'inexcusable absence presque totale
de Québécois dans l'équipe : C'est parce que le Québec, disent-ils, ne
produit pas assez de bons joueurs ! Elle est bien bonne.

Quoi qu'il en soit, peut-on imaginer les équipes de Toronto et d'Ottawa
avec deux ou trois joueurs canadiens dans leurs rangs, et des entraîneurs
qui ne parlent pas anglais ? Peut-on imaginer le Real Madrid sans de très
nombreux Espagnols ?

Le Canadien de Montréal est la seule équipe de sa ligue dont une majorité
de supporteurs appartient à une nation autre que celle de l'Amérique
anglaise. En clair, en pratique, cette équipe n'est pas dans le même pays
que les autres. De ce fait, elle revêt automatiquement un caractère
national qui, utilisé à bon escient, peut lui être un formidable avantage,
comme en fait foi son passé glorieux, dessiné par des Mahovlich et des
Bowman, bien sûr, mais aussi des Richard, Béliveau, Lafleur, Roy et tant
d'autres.

***

Ignoré, par contre, ce trait national devient un boulet; on se construit
alors une équipe de mercenaires qui viennent ici gagner leur croûte,
peinards, avant de s'enfuir à toutes jambes dans les heures qui suivent la
fin de saison. Baragouiner un peu de français ? C'est, pour la plupart,
trop leur demander. Pourquoi s'embêteraient-ils de ce folklore décoratif ?

Le plus fou, c'est qu'on ne discute pas, ici, de tennis, de baseball ou de
water-polo, mais bien de hockey sur glace, ce sport qui est au Québec ce
que la salsa est à Cuba. Le hockey traverse la culture québécoise de bord
en bord, nous en avons écrit l'histoire et y occupons une place magistrale,
et nous voilà exclus de notre propre équipe, que nous avons pourtant rendue
mythique, et élevée au rang de plus prestigieuse et connue au monde, et ce,
selon plusieurs, tous sports confondus.

Or, par pure bêtise, insensibilité, ou pour d'autres raisons dont je n'ose
imaginer la teneur (Curzi, lui, a osé publiquement, s'attirant quelques
tomates), le Montreal Canadian refuse systématiquement d'assumer son
identité québécoise, préférant se transformer en succursale standardisée de
la National Hockey League à Montréal. Depuis quelques années, tout ce qui
est québécois a été méticuleusement éliminé de cette institution, ou réduit
à la portion drastiquement congrue.

Résultat, nous voilà dans la situation absurde où les entraîneurs et
joueurs québécois évoluent partout sauf ici. À condition, bien sûr, d'être
particulièrement brillants parce que, autrement, à talent égal, cette ligue
préfère les anglophones. À peu de choses près, il en va de même pour les
joueurs Russes, Finlandais, Suédois, ou d'autres pays européens. Dans la
NHL, les Québécois sont des étrangers comme les autres, y compris à
Montréal, ce qui est absolument lamentable.

Si, comme le Québec, la Suède avait une équipe dans cette ligue,
pensez-vous qu'elle ne compterait que deux ou trois Suédois, et un
entraîneur canadien ? Comme dirait Michel Bergeron, poser la question,
c'est y répondre.

Quelles que soient les performances de cette formation dé-Québécisée au
maximum, son visage actuel est, au mieux, un non-sens, au pire, une vraie
honte et un affront. La nomination d'un entraîneur unilingue anglais, qui
fait tant réagir, n'est que la suite d'une longue liste de signaux de
mépris de cette compagnie à l'endroit de sa clientèle. Vivement les
Nordiques, et que Quebecor comprenne son intérêt à proposer une vraie
équipe québécoise. Et vivement une équipe olympique du Québec. Ça presse.

Nic Payne

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5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    22 décembre 2011

    En réplique à Pierre Curzi un reportage de CTV de l'an dernier.
    Montreal Canadiens are no federalist tool: owner
    http://www.ctv.ca/CTVNews/TopStories/20100916/habs-federalism-complaint-100916/
    Vous entendrez Scott Gomez parler français,Geof Molson dira qu'il n'est pas un politicien,Pierre Boivin que c'est la faute à la mondialisation et Maxime Lapierre nous apprendra que la seule chose qui compte c'est de gagner.
    Maintenant le boomerang se retourne contre eux.
    Et oui Pierre Curzi avait raison mais tous les médias à l'époque,francophones inclus,ont choisis de le ridiculiser et du même coup de nous ridiculiser.
    Merci Pierre Curzi pour avoir défié ce discours dominant de nos médias serviles et propagandistes.

  • Archives de Vigile Répondre

    21 décembre 2011

    Reste une chose unique à faire si on aime le hockey,
    . ne pas dépenser un rond pour cette équipe;
    . ne plus acheter de produits Molson;
    . aller voir du vrai hockey ou il y a encore des Québécois, le Junior Majeur (qui en passant fait tout aussi pour s'angliciser)
    Ceci dit, quand les équipes Junior du Québec jouent contre les équipes de l'Ontario et de l'Ouest, elles performent très bien. Le racisme de la NHL et surtout des Montreal Canadians est réel....
    Moi plus une seconde de temps pour eux....Tout mon respect à Dryden et Robinson qui ont appris le français cette langue maudite. Pour Gainey, il le parle mais il a tout fait pour qu'il n'y ait plus de Québécois francophones dans cette team...
    Curzi avait raison. Il a cependant fait reculer l'idée d'indépendance en quittant et cela permettra à JJ et ses minions de reprendre le pouvoir

  • Archives de Vigile Répondre

    21 décembre 2011

    À plusieurs reprise récemment j'ai pu prendre la mesure d'une chose que l'on néglige peut-être; le fait que c'est la Constitution du Canada qui interdit totalement au Québec d'agir avec détermination dans plusieur secteurs clé.
    Un travail de recensement de tous les interdits mis en parallèle avec les positions québécoises pourrait faire partie de l'argumentaire pour le recouvrement de notre véritable autonomie politiqe.
    On parle ici de langue mais il y a d'autres secteurs névralgiques de la vie qui sont en cause. Par exemple la question du registre des armes à feu, la loi sur les contrevenants mineurs etc. Mais aussi bien entendu la langue
    Je dis ça parce qu'il est bien évident qu'un peuple qui ne possède pas tous les leviers lui permettant d'assurer son épanouissement ne peut en bout de ligne que finir par sombrer et se fondre dans l'amalgame qui l'entoure.
    L'affaire du Canadien serait impossible à Barcelone, à Berlin, à Rome, à Paris ou à Londres. C'est ça le clou sur lequel il faut taper sans relâche. Jusqu'à ce que ce soit compris.

  • Réjean Labrie Répondre

    20 décembre 2011

    The Montreal Canadians: n'est-ce pas là une manière de désigner l'ensemble des anglophones et des allophones de la métropole? En effet, ce sont d'abord et avant tout des Canadians établis ici comme s'ils étaient dans le reste du Canada.
    Réjean Labrie

  • Archives de Vigile Répondre

    20 décembre 2011

    ''Réveillez-vous que diable!.... -Alors qu'ils en étaient propriétaires dans les années 70, les frères Bronfman, avaient menacé de déplacer l'équipe si jamais les Québécois optaient pour l'indépendance''
    La chronique de Normand Lester
    http://fr-ca.actualites.yahoo.com/blogues/la-chronique-de-normand-lester/le-club-hockey-canadien-est-anglophone-depuis-70-204835092.html