Alain Miville De Chêne et Denis de Belleval à la Commission parlementaire sur le projet de loi 204.
Photo Le Soleil Yan Doublet
Le psychodrame auquel a donné lieu la contestation par deux simples citoyens de l'entente intervenue entre la Ville de Québec et Quebecor Media sur la gestion d'un nouvel amphithéâtre aura certainement accentué le malaise qui mine la bonne réputation de la gestion municipale au Québec. Le manque de moyens et de volonté de la part du ministère des Affaires municipales pour faire respecter les lois et les règles de bonne gouvernance locale n'est pas étranger à cette dégradation. La mauvaise monnaie chassant la bonne, c'est tout le corps municipal qui est ainsi injustement affecté.
Au-delà des pratiques mafieuses, des conflits d'intérêts, du copinage plus ou moins licite, le discours ambiant ravale la conception même de la démocratie municipale. L'administration d'une ville n'est pas un business. Les maires ne sont pas des entrepreneurs privés, des amuseurs publics ou les chefs d'orchestre du concert des «grenouillards» qui tentent de faire main basse sur la ville. Au contraire, ils doivent s'élever au-dessus des intérêts particuliers et se distancier de ceux qui prétendent développer la ville, alors qu'ils la défigurent et ne font prospérer que leurs propres affaires. Là aussi les excès des uns finissent par entacher les activités honnêtes et légitimes des autres.
De ce point de vue, le hockey professionnel remporte la palme. Cette industrie est si mal gérée que la majorité de ses membres est en faillite virtuelle. Seul l'abreuvoir aux fonds publics lui permet de subsister. Ce serait le cas à Québec au-delà de toutes les limites du raisonnable. Quebecor Media joindrait ainsi les rangs de ceux que nos compatriotes anglophones appellent les corporate welfare bums, les assistés sociaux millionnaires, qui prolifèrent un peu partout dans notre tissu économique et qu'il ne faut pas confondre avec les entreprises véritablement créatrices de richesse pour l'ensemble de la société.
La quête servile et ruineuse d'une franchise sportive professionnelle gangrène le tissu social de nombreuses villes dans le monde et donne lieu régulièrement à la mise au jour de combines et de désastres pour les finances publiques. Le cancer de la politique populiste est à la source de ces dérives. Il en est de même à Québec. Le mal a migré jusqu'au niveau de la direction de l'opposition officielle à l'Assemblée nationale qui a abdiqué ses fonctions et perdu toute crédibilité dans son action future.
Il faut nous ressaisir!
L'occasion nous en sera donnée par la décision du premier ministre de reprendre dans un cadre normal et plus serein le débat suscité par le dossier de la gestion d'un éventuel amphithéâtre à Québec.
Or, constatons que les dispositions nouvelles de la Loi des cités et villes, censées resserrer les règles d'attribution des contrats, ont été sabotées à leur premier test par la tentative d'adoption du projet de loi 204. Comment nous assurer qu'un possible élargissement des pouvoirs des villes en matière de gestion d'équipements sportifs ne débouche pas sur des dérives pires encore?
Constatons aussi le caractère quasi inopérant des dispositions des lois qui permettent aux citoyens d'accéder aux tribunaux pour obtenir l'annulation de gestes illégaux de la part d'une municipalité. L'Assemblée nationale devra aussi réfléchir à cet aspect des choses, l'automne prochain, et trouver des mécanismes de surveillance plus efficaces et plus appropriées.
C'est donc à un débat de fond que nous convie le premier ministre, débat que l'on ne pourra expédier en deux temps, trois mouvements.
Au contraire, l'intention du ministre des Affaires municipales de ramener en septembre prochain le scénario condamné par le Barreau du Canada, celui du Québec et les associations municipales est socialement irresponsable et politiquement suicidaire.
Dans l'intervalle, constatons en dernier lieu que l'entente Labeaume-Péladeau est caduque, le maire de Québec et le premier ministre ayant eux-mêmes confirmé son manque d'assise juridique. La prolonger n'effacerait pas cette tare congénitale.
Nous maintenons donc notre requête en nullité jusqu'à ce que la Ville de Québec et Quebecor Media acceptent de prendre acte de l'inanité de poursuivre leurs démarches dans le cadre actuel.
Nous continuons aussi de faire appel à la générosité de ceux qui nous soutiennent de façon à permettre le financement de notre action en justice.
L'éthique, la transparence, la rigueur
Nous remercions chaleureusement celles et ceux qui, partout au Québec, ont compris et soutenu notre démarche. Nous remercions aussi les députés indépendants de l'Assemblée nationale, anciens et nouveaux, sans lesquels nous n'aurions pas été entendus.
L'éthique, la transparence et la rigueur dans l'utilisation des fonds publics ont été nos seuls guides dans le débat que nous avons mené. Nous avons la satisfaction de constater que nos convictions sont largement partagées par celles et ceux pour qui l'exercice de la politique repose sur des idéaux, des convictions, des principes et non la simple quête d'une popularité éphémère.
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Denis de Belleval a été ministre sous René Lévesque et directeur général de la ville de Québec
Alain Miville de Chêne est homme d'affaires
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