La leçon doctrinale, postmoderne et archaïsante, de Québec Solidaire …

Laïcité et Québec Solidaire

On se demandait où était passé le tandem dirigeant de Québec Solidaire, alors que le Secrétaire général de ce groupuscule para-politique se surpassait dans la maladresse textuelle, entonnant un hymne néo-maccarthyste destiné à lancer les troupes de QS dans une croisade militante contre les « fanatiques de la laïcité » ([« Port de signes religieux - Québec solidaire ose aller à contre-courant »->24906], Benoît Renaud, Le Devoir (section « Idées »), Montréal, 6-1-2009.)
Or le duo David – Khadir était en train de nous concocter une docte leçon de savoir vivre ([« Laïcité - Pour un débat large, ouvert et démocratique »->25175], Françoise David et Amir Khadir, Le Devoir (section « Opinions »), Montréal, 18-1-2010.), dans le cadre de leur programmatique implicite (« Saper les bases de la modernité, et disparaître en tant que nation »), tout en tentant, par un exercice de style inspiré de la pire argumentation jésuitique et de la meilleure élucubration néo-stalinienne, de redresser la barre de leur barque militante en perdition, au mauvais vent d’un naufrage organisationnel appréhendé.
Juchés sur leurs estrades professorales, Françoise et Amir s’adressent à nous, pauvres lecteurs (ignares), pauvres pêcheurs (« racistes », « xénophobes », « islamophobes » et « fanatiques » potentiels ou avérés…), et ils nous livrent une magistrale leçon d’Histoire … digne de figurer dans une anthologie des « Soporifiques contes historiques à dormir debout ». Il est vrai que le formidable écart de leur « leçon » avec le contenu de la science historique, est parfaitement justifié par leur légitime désir de nous sauver des flammes infernales de l’« intolérance », et autres travers lucifériens.
Du haut de son admirable savoir autoproclamé, le duo à la barre de QS a quand même le tact de nous épargner, en se référant à la modernité de la France, le récit des luttes sanglantes qui ont accompagné ce combat contre la classe féodale et les notables religieux qui en faisaient partie. La leçon de choses sociales est en effet habilement recadrée historiquement, et centrée sur la présentation pédagogiquement orchestrée des « Bons », promoteurs de la « liberté de conscience », et des inévitables « Méchants », partisans acharnés d’une « lutte idéologique contre le clergé ».
On devinera sans peine que le duo est du côté des « Bons », et non pas des fanatiques, ouvriers et petit-bourgeois, qui ont repris au 19e et au 20e siècle le flambeau de la modernité, après que la bourgeoisie eut trahi ses combats historiques. Le brave lecteur est rassuré, il est en bonne compagnie, avec les « Lumières » les plus brillantes de « la civilisation occidentale » ! Il eut quand même été de mauvais goût de faire état des exactions perpétrées par les ouvriers « fanatiques de la laïcité » lors de la Commune de Paris !
Nos doctes tribuns de QS sont ainsi autorisés à brandir très haut le flambeau de la « liberté de conscience » : un exercice pédagogique d’auto-évaluation les amène de plus, sans difficulté apparente, à s’octroyer un diplôme de « modernité ».
Deuxième partie de la leçon : on peut maintenant passer à un exercice rhétorique périlleux, mais les héritiers des « marxistes-léninistes » des années 70-80 sont passés maîtres dans cet art, qui consiste à dire une chose et son contraire, dans un discours où ceux qui ont la foi sont disposés à y reconnaître la logique la plus rigoureuse. On se rappellera que, lors du Référendum de 1980 sur la souveraineté du Québec, les « ml », opposés au nationalisme québécois, forcément « bourgeois », ainsi qu’au fédéralisme, avaient de fait contribué à la victoire du « Non ». Le même scénario s’est répété plus récemment, avec une contribution électorale significative à la prise du pouvoir par le PLQ de Jean Charest, puis au maintien de ce pouvoir.
La leçon, qui se poursuit dans la science vestimentaire, identifie les Sumériens comme inventeurs du voile et de l’« oppression patriarcale » qui y serait associée. Ce sont évidemment des « Méchants » : « il n'y a aucune ambiguïté là-dessus » !
Mais, nous avons pris note du fait que les « Bons » sont pour la « liberté de conscience », ce qui nous permet, dans une très élégante logique, de conclure que l’on doit autoriser le port des signes religieux par les employés de l’État.
On peut donc, en toute logique, être à la fois pour la laïcité, et contre ce même principe !
Dernier tour de piste de nos professeurs-artistes : « La laïcité n'est pas du racisme » … mais « elle est aussi du racisme ». Cette brillante conclusion permet de remettre à l’ordre le bouillant Secrétaire général du parti, et de lui donner raison en même temps. Le calme est revenu – ou presque – dans la barque de QS …
Les mauvais élèves, qui oseront affirmer que la « liberté de conscience » n’a rien à voir avec le privilège individualiste ou communautariste autorisant à réinvestir le religieux dans la sphère de l’État, ceux-là, ces cancres, seront affublés du bonnet d’âne les identifiant comme « racistes », etc.
Quant à moi, je fais malheureusement partie de ces mauvais élèves qui n’arrivent pas à assimiler la leçon doctrinale, postmoderne et archaïsante, de Québec Solidaire. Je n’ai pas compris que ces dérives individualistes ou communautaristes, que mon « racisme » impénitent désigne comme postmodernes, sont en fait authentiquement laïques et modernes ! Il est vrai que je suis un dangereux récidiviste, puisque la revue théorique du groupe « ml » En Lutte m’avait déjà fort justement identifié comme un « bourgeois contre-révolutionnaire ».
Je persiste et signe en affirmant que QS instaure un faux débat sur la « liberté de conscience » en matière de laïcité, alors qu’aucune restriction n’est appliquée au Québec, hors de la sphère étatique, à l’expression des croyances religieuses et à la participation aux rites des diverses confessions. De plus, les dérives déviantes des sectes religieuses en prolifération dans notre société, ne sont même pas l’objet d’un contrôle social étatique adéquat !
Bonne nouvelle quand même : Au nom de la « liberté de conscience », sous un gouvernement de QS (ce qui ne saurait tarder selon les militants de cette confession), les enseignants auront le droit de se déguiser en « raéliens », ce qui transformera certainement pour le mieux les rapports avec les élèves, et les infirmières auront fière allure avec leurs clochettes et leurs costumes bigarrés de la secte Hare Krishna ! Je vous laisse imaginer la beauté carnavalesque qui se dégagera du sabotage légal et systématique de nos normes sociétales !
Cordialement
Yves Claudé – immigrant, et citoyen du Québec moderne
ycsocio@yahoo.ca
Éléments complémentaires:
http://www.vigile.net/Contre-le-neo-maccarthysme-de
http://www.vigile.net/Les-derives-de-la-CDPDJ


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    30 janvier 2010

    Monsieur Jean-Maurice Demers,
    Je comprends tout à fait le dilemme qui est le vôtre. Il n’est pas évident de se trouver piégé dans une structure politique qui reproduit un type de contrôle sur les membres que l’on croyait révolu.
    QS ne semble pas avoir la capacité de remettre en question son orientation individualiste postmoderne et le cul-de-sac politique que cela représente. Comme QS ne contrôle pas l’État, le seul coût de la dissidence est une possible exclusion du parti, à moins que des pratiques apparentées à celles des sectes religieuses n’amènent des violences de type moral ou autre à l’encontre des dissidents. Déjà à l’époque de l’UFP, j’avais reçu des menaces ressemblant à celles que les néo-nazis ont coutume de m’adresser, du simple fait que j’avais remis en question une stratégie électoraliste groupusculaire et à courte vue de l’UFP … J’en avais alors conclu que cette organisation ne s’était pas affranchie de son stalinisme fondateur …
    Il vous reste à décider si vous allez tenter de maintenir une orientation moderne et progressiste au sein de QS, ou choisir de poursuivre ailleurs et autrement votre engagement politique …
    Solidairement
    Yves Claudé
    ycsocio[@]yahoo.ca
    30 janvier 2009

  • Archives de Vigile Répondre

    29 janvier 2010

    M. Claudé,
    Je suis 10 jours en retard sur votre texte, mais un commentaire me turlupine le clavier.
    Je suis un des membres fondateurs de Québec Solidaire. J'avais mis beaucoup d'espoir dans une union des forces progressistes du Québec. Le PQ ne représente plus, et depuis fort longtemps, mes aspirations pour un pays fondé sur un projet de société à gauche de l'échiquier politique. Comme plusieurs autres, j'ai milité pour le PDS, puis le RAP, l'UFP, et enfin, après plus de 10 ans, pour QS. Malheureusement, les « déraps» d'un petit groupe « d'incorruptibles », des robespierristes qui ont formé « un comité de salut public » au sein même de QS, dont Benoît Renaud n’est qu’un facsimilé, se sont arrogé le droit de déterminer ce que l'on doit penser, dire, proposer, et véhiculer à l'intérieur comme à l'extérieur de QS. La controverse du foulard islamique n'est que le révélateur d'un cancer qui emportera à terme QS. Pour peu que vous ne partagiez pas les idéaux de ces « parfaits », on exercera sur vous la pire des censures, niant votre fondamental droit de parole.
    Benoît Renaud, qui se pense antiraciste, n'hésite pas à exercer un racisme de bas étage contre son peuple. Aucune petite gêne dans ses accusations de racisme, de xénophobie, d'islamophobie, etc. L'amalgame et la malhonnêteté intellectuelle, dont il fait preuve, sont à l'image de ce « comité de salut public ». Lorsqu'on assimile islamophobie (peur et lutte contre une idéologie religieuse, des croyances, des pratiques) à du racisme primaire (opposition et lutte contre des personnes ou groupes de personnes) on utilise un amalgame, dont on accuse Mme Sirois, digne de philos 101 pour les nuls. J'en parle en tout état de cause, j'ai eu à subir cette tentative de bâillon, de censure, d'intimidation par une montée écarlate d'hormones de « laïcité ouverte » d'un deuxième B.R.. Présentement, le torchon brule au sein même de QS, et à terme, il est à prévoir des sorties fracassantes comme celle de Mme Sirois. Avez-vous lu ou entendu les porte-paroles du parti semoncer Benoît Renaud ? Non, alors qui ne dit mots...
    Ce parti déçoit totalement la vraie gauche québécoise. S'il ne se rattrape pas, il n'aura eu dans son histoire qu'un unique député à l'assemblée nationale. J'entends bien demander raison à M. Renaud: 1e, d'avoir semoncé , et sans mandat, Mme Sirois au nom de QS; 2e, d'avoir parlé en mon nom comme membre, incriminant aussi tous les membres de QS; 3e, de m'avoir accusé, en tant que québécois, de racisme, d'islamophobie et de xénophobie. Nul ne peut être poursuivi pour une attaque contre une idéologie, une religion, islamophobes dormez tranquille. MAIS, une accusation de racisme se retrouve facilement devant les tribunaux.
    J'attends la réplique de M. Renaud, il m'accusera d'islamophobie, car à QS on sait que je m'oppose vigoureusement à l'Islam combattant, à l’islam de la charia, à l’Islam du prêche du vendredi dans certaines mosquées de Montréal. Je continuerais à défendre mordicus mon droit à exprimer publiquement mes opinions. Alors, si ça vous fait du bien, je suis islamophobe, antiraciste, républicain, socialiste. Bon, maintenant que se passera-t-il? Vais-je me retrouver devant les tribunaux? Le ciel va-t-il me tomber sur la tête? Allez-vous m'expulser de QS? Je n'en ai rien à foutre de vos crisettes de pseudo modernistes. Et à se dire à contrecourant, on finit par se noyer. Attention de ne pas devenir « phobophobes ».
    Et c'est en toute liberté de paroles que je signe de mon vrai nom.
    Jean-Maurice Demers
    P.-S. Si ça vous intéresse M. Renaud, à QS, mon numéro de carte de membre est le 140.

  • Pierre Schneider Répondre

    20 janvier 2010

    Très heureux de me ranger, moi aussi, parmi les "mauvais élèves". Maudit que nos révolutionnaires de salon sont dans les vapes.

  • Archives de Vigile Répondre

    20 janvier 2010

    La position de QS dans le débat sur la laïcité est insupportable. Ses dirigeants parlent des deux côtés de la bouche à la fois!
    Il est urgent qu'une constitution du Québec définisse ce qu'est la religion et la place qu'elle doit occuper dans l'espace public.
    En ce qui me concerne, la religion est une démarche personnelle et privée. Elle doit s'exercer dans leurs temples respectifs, pour les juifs à la synagogue, pour les musulmans à la mosquée et pour les chrétiens à l'église. L'espace public doit être neutre.
    Tant qu'à moi, les gens peuvent réciter tous les ''mantra'' qu'ils désirent, faire tous les salamalèques et réciter toutes les prières qu'ils veulent, si cela est fait dans le domaine privé; je n'ai aucun problème avec ça!
    Une cabane à sucre n'est pas un lieu de culte mais un endroit pour goûter les produits de l'érable et se divertir. Alors la décision pour son propriétaire aurait dû être simple .
    Nous avons vécu deux cents ans de soumission au catholicisme; les chacals aboient encore aux portes. Ils n'attendent qu'une chose, que nous baissions notre vigilance. Observez les groupes évangélistes américains en Haïti! Écoutez leurs déclarations!
    La religion dans l'espace public; NON MERCI!