Lac-Mégantic — La compagnie ferroviaire Montreal, Maine and Atlantic Railway (MMA) n’a pas donné suite à la mise en demeure envoyée mardi midi par la Ville de Lac-Mégantic, ignorant ainsi l’ultimatum de 48 heures fixé par la mairesse Colette Roy-Laroche.
La Ville a sommé la MMA de lui rembourser la somme de 4 millions de dollars qui a servi à payer les travailleurs dépêchés pour décontaminer et nettoyer le centre-ville de la municipalité sens dessus dessous depuis trois semaines. Lac-Mégantic avait avancé les salaires impayés des sous-traitants - dépêchés par nul autre que la MMA au lendemain de la catastrophe ferroviaire - afin de ne pas retarder la progression des travaux sur le site, où 47 personnes ont perdu la vie le samedi 6 juillet.
Mme Roy-Laroche s’est dite déçue du silence de la MMA tout en précisant que d’autres recours étaient dorénavant envisagés pour que l’équipe de direction de la compagnie ferroviaire fasse face à ses responsabilités. « Je souhaitais que la compagnie se comporte en bon citoyen corporatif, c’est la moindre des choses que j’attendais de la compagnie », a-t-elle déclaré, lors d’un point de presse.
Des avocats de la municipalité et du gouvernement du Québec réfléchissaient jeudi après-midi notamment à la possibilité de traîner la MMA devant les tribunaux. « Il m’est difficile de vous dire quelle sera la voie empruntée par la Ville et le gouvernement du Québec », a dit Mme Roy-Laroche.
Elle était incapable de préciser si de nouvelles factures devront être réglées par la municipalité afin d’éviter que les travailleurs ne tournent les talons ou menacent de le faire.
Les travaux effectués par les sous-traitants à l’intérieur de la « zone rouge » doivent se poursuivre sans encombre, a une nouvelle fois réclamé la mairesse. « C’est la priorité », a-t-elle lancé. Lac-Mégantic a « l’assurance que les travaux vont se poursuivre », a-t-elle par la suite ajouté, spécifiant du même souffle qu’un chargé de projets avait été dépêché sur le site des opérations afin de suivre à la trace les travailleurs.
La municipalité réfléchit toutefois à la possibilité d’y déployer sa propre équipe pour procéder à la décontamination et au nettoyage du centre-ville.
De passage à Lac-Mégantic, la députée fédérale Olivia Chow a déploré l’attitude de l’équipe de direction de la MMA. « La moindre chose qu’elle pourrait faire, c’est de payer pour le nettoyage du dégât », a affirmé la porte-parole de l’opposition officielle en matière de transports.
De son côté, la ministre fédérale des Transports, Lisa Raitt, a assuré sept maires des régions de la Montérégie et de l’Estrie que le réseau de chemins de fer de la MMA avait été inspecté au cours des derniers jours, a confié le maire de Sherbrooke, Bernard Sévigny, à Radio-Canada. Mme Raitt a rencontré les élus jeudi dans les bureaux de Transports Canada, à Dorval.
Plus tôt jeudi, des enquêteurs de la Sûreté du Québec (SQ) ont entrepris une perquisition dans les bureaux de la MMA à Farnham, en Montérégie. Une équipe de 15 enquêteurs a été dépêchée dans les locaux de la compagnie ferroviaire à la recherche de différents éléments de preuve pouvant « appuyer des accusations criminelles » en lien avec le déraillement de Lac-Mégantic, a indiqué l’inspecteur Michel Forget. Il n’a toutefois pas précisé la nature des « éléments » confisqués.
Menant une enquête criminelle « sans précédent » sur les circonstances entourant la tragédie de Lac-Mégantic, la Sûreté du Québec n’hésitera pas à « s’adjoindre les corps policiers, qu’ils soient à l’extérieur du pays ou au Canada, nécessaires pour conduire les perquisitions », a ajouté le porte-parole.
Cinq dernières victimes introuvables
À Lac-Mégantic, les enquêteurs de la Sûreté du Québec devaient ratisser « trois scènes » où ils ont espoir de trouver de nouvelles victimes. « Malheureusement, nous n’avons pu trouver aucune victime à travers les différentes recherches que nous avons effectuées », a dit M. Forget, portant autour du poignet un bracelet « courage et solidarité avec Lac-Mégantic » mis en vente vendredi.
Quarante-deux victimes ont été extirpées des décombres en 21 jours. Les enquêteurs et les scientifiques qui s’affairent à retrouver les cinq derniers corps à Lac-Mégantic sont de plus en plus confrontés à des défis complexes, a indiqué de son côté la porte-parole du Bureau du coroner, Geneviève Guilbault. La taille et l’état des restes humains rendent les recherches de plus en plus difficiles et les opérations de plus en plus minutieuses afin de trouver des restes qui pourront conduire à l’identification des victimes.
Au total, 31 des 47 personnes décédées dans le brasier ont été formellement identifiées par le Bureau du coroner à ce jour. « Les expertises pouvant conduire à l’identification d’ossements sont plus complexes et peuvent exiger plus de temps. Par contre, on continue de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour qu’on puisse les retrouver. Et on a bon espoir d’obtenir des résultats positifs au cours des prochaines semaines », a affirmé Mme Guilbault.
Plusieurs familles endeuillées ont pu s’approcher du site d’enquête, question d’apprivoiser la disparition d’un de leurs proches.
Lac-Mégantic : mesurer les conséquences de la tragédie
La MMA ne répond plus
La compagnie a ignoré l’ultimatum de Lac-Mégantic, qui réclame le remboursement des 4 millions de dollars avancés aux sous-traitants chargés du nettoyage du site
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