Le jour où Philippe Couillard était «écoeuré» d’Anticosti…

«Anticosti, moi j’ai rien à voir avec ce projet-là. Je l’ai trouvé à mon arrivée au gouvernement.»

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Comme ça, du jour au lendemain...

Certains écoutent des vieux matchs des Expos dans leurs temps libres; pour moi, ce sont les vieilles conférences de presse qui servent de passe-temps. Et parfois, je tombe sur des petits détails qui m’avaient échappé à la première écoute. Comme lors de cette conférence de presse en décembre dernier, à Paris.

Petite mise en contexte. Ce jour-là, Philippe Couillard est installé dans une salle trop petite de la COP 21, au Bourget, et se laisse flatter par les propos de l’ex-vice-président américain, Al Gore, en train de l’élever au rang de héros.

«Le Québec donne l’exemple» («Here, Quebec is showing the way»), dit l’environnementaliste en réaction à l’annonce que vient de faire le premier ministre. Quelques minutes auparavant, Couillard avait dévoilé une aide de 25 millions de dollars pour aider les pays d’Afrique francophones à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Devant des invités triés sur le volet, Al Gore ne ménage pas ses compliments.

«Merci à la population du Québec», lance-t-il avant de se tourner vers le premier ministre Couillard. «Vous êtes en train de devenir les vrais héros de la lutte mondiale aux changements climatiques. Vraiment!» Saoulé par ces paroles et flottant sur un nuage vert, rien ne semble pouvoir atteindre un Philippe Couillard au comble de l’extase, jusqu’à ce que la journaliste de Radio-Canada, Catherine Mercier, s’amène au micro.

«Je suis un peu confuse, dit-elle. On apprend que le Québec va investir 25 millions pour aider les pays les plus vulnérables à faire une transition énergétique. Et du même coup, on sait que le Québec va investir plus de 100 millions de dollars dans l’exploration pétrolière à Anticosti. Alors, je me demande un peu où est la cohérence».

Le visage de Philippe Couillard se durcit et le sourire qu’il affichait il y a quelques secondes, fait place à une irritation qu’il ne cherche même pas à dissimuler.

«Anticosti, moi j’ai rien à voir avec ce projet-là, répond-il sèchement. Je l’ai trouvé à mon arrivée au gouvernement. J’aurais préféré ne pas le trouver, madame. Parce que j’étais opposé à ce projet-là quand j’étais dans l’opposition. Le gouvernement du Québec, de nos prédécesseurs, a signé un contrat (…). S’il-vous plait, arrêter de dire que je suis le promoteur d’Anticosti, chu tanné là. Ça fait plusieurs fois que je dis que c’est pas mon projet», rage Philippe Couillard.

Le premier ministre vient de comprendre qu’il a perdu le contrôle de la conférence de presse et le dérapage ne fait que commencer.

«Comment l’industrie doit décoder votre message?», demande Patrice Bergeron de la Presse Canadienne. «Je crois qu’elle doit décoder que je n’ai aucun enthousiasme pour développer les hydrocarbures au Québec», répond Philippe Couillard, déclenchant dans l’assistance, une salve d’applaudissements. Mais il n’est pas au bout de ses peines.

«Si vous dites que vous n’avez pas d’appétit pour les hydrocarbures, pourquoi ne pas tout simplement abandonner l’exploration?», lui demande un autre journaliste (moi-même).

«Le problème c’est qu’on a un contrat signé par le gouvernement du Québec, avec des pénalités en cas de non-respect. Croyez-moi, c’était pas mon choix de trouver ce contrat-là signé à mon arrivée», tonne Philippe Couillard.

Volant à son secours, le porte-parole du premier ministre, Harold Fortin, met fin à la conférence de presse. Mais au moment où invités et journalistes quittent la salle, Philippe Couillard se tourne vers ses conseillers. Ne se doutant pas que les micros sont toujours ouverts, il lance discrètement: «J’espère qu’y vont arrêter de m’écoeurer avec Anticosti, là!». C’était bien mal connaître les journalistes.

Le lendemain, la vice-présidente de Gaz Métro, Stéphanie Trudeau, également présente à Paris, s’étonnait de ces propos.

«Je suis assez convaincue que les gens qui veulent exploiter les hydrocarbures au Québec ont dû être déçus», dit-elle prudemment. Mais plutôt que de la rassurer, Philippe Couillard en rajoute.

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