Le mal de mer

Crime organisé et politique - collusion (privatisation de l'État)



La députée adéquiste Sylvie Roy a lancé une nouvelle loterie hier, lorsqu’elle a affirmé que trois ministres du gouvernement Charest avaient déjà séjourné sur le yacht de luxe de l’entrepreneur Tony Accurso, au centre des allégations de corruption à la Ville de Montréal. Tous les ministres sont du coup soupçonnés de s’être mouillé les pieds.
La députation libérale a eu les jambes sciées. Il fallait assister à la sortie des ministres du Salon bleu. Chacun était interpellé à tour de rôle par les journalistes, avec un certain cynisme, à l’intérieur d’une sorte de haie de la honte : étiez-vous sur le bateau? Leurs négations demeureront enregistrées et pourraient toujours servir… Ils étaient nombreux à prétexter avoir le mal de mer.
La bombe de la députée Roy amènera évidemment le bureau du premier ministre à effectuer des contre-vérifications pour sommer d’éventuels « coupables » à passer aux aveux. Dans les corridors de l’hôtel du Parlement, les soupçons ont cependant vite convergé vers les quelques mêmes individus.
L’ADQ, qui joue dans cette affaire le petit filet de crédibilité qui lui reste, a certifié en fin de journée que ses renseignements sont bétonnés.
La pression monte
Le sondage publié hier par le Journal a démontré le désir de 76 % des Québécois qu’une commission d’enquête fasse la lumière sur la collusion présumée d’entrepreneurs qui soumissionnent pour décrocher des contrats municipaux et sur le financement des partis politiques met déjà beaucoup de pression sur le gouvernement Charest.
Les révélations d’hier de la députée Sylvie Roy appuient plus que tous les arguments à l’effet que des enquêtes policières sont insuffisantes. Celles-ci porteront sur de possibles crimes commis par des piliers de l’industrie de la construction. Les policiers ne se pencheront pas sur la moralité et l’éthique des politiciens, municipaux ou provinciaux. Ce n’est absolument pas de leur ressort.
Les policiers sont d’ailleurs toujours sur les épines lorsqu’ils doivent traiter des dossiers qui touchent les personnalités publiques. Il leur a fallu plus d’un an et une procédure d’exception avant de porter des accusations contre l’ex-lieutenant-gouverneur Lise Thibault, soupçonnée de fraude, et ce, même si les vérificateurs généraux à Ottawa et à Québec leur avaient fourni déjà bien mastiqué tout l’essentiel du matériel nécessaire.
Une diversion
L’annonce par le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, de la création de « l’Escouade marteau » de la Sûreté du Québec pour enquêter sur des malversations dans l’industrie de la construction est donc apparue dans ce contexte comme une tentative de plus du gouvernement Charest d’étouffer un mégascandale qui l’arroserait s’il était étalé sur la place publique.
Les enquêtes policières se déroulent derrière des portes closes, et les citoyens n’en voient que les résultats qui se rendent devant les tribunaux à la suite d’actes criminels. On ne sait rien du contenu, autre les interrogatoires qui sont menés, sur l’identité des personnes, les accointances politiques, la moralité ou l’immoralité des gestes posés, même s’ils ne sont pas illégaux.
Une autre donnée du sondage d’hier devrait aussi alimenter la réflexion des stratèges du bureau du premier ministre. La population n’a aucune confiance dans ce gouvernement et les méthodes qu’il préconise pour régler les problèmes d’éthique dans le monde municipal ou de collusion dans l’industrie de la construction.
Les politiciens trouvent toujours des façons de diriger les caméras dans la direction opposée à la leur. Les policiers amèneront devant les tribunaux quelques boucs émissaires parmi les entrepreneurs, et la classe politique ne sera pas inquiétée. Il faut pourtant être deux pour danser le tango.


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