Le gouvernement a beau s’emballer, le projet de Mine Arnaud à Sept-Îles reste aussi opaque, en ce lundi où le feu vert lui a été donné, qu’il l’est depuis un an. Il faut faire confiance, semble-t-il. Tout un acte de foi alors que Québec est non seulement juge et partie du projet, mais en démarche de vente de son grand oeuvre : le Plan Nord. La distance manque dans cette affaire et il faudrait être confiant ?
Qui a vraiment douté que le controversé projet de mine d’apatite à ciel ouvert à Sept-Îles serait autorisé ? En dépit du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) qui, en février 2014, posait une foule de questions sur ce projet qu’il jugeait inacceptable et à modifier, les libéraux de Philippe Couillard lui ont toujours donné leur appui.
De toute manière, Sept-Îles ou ailleurs, le scénario ne change pas : la perspective de créer des emplois l’emporte sur toutes les réserves, et rares sont les élus qui y résistent. Sept-Îles s’est déchirée sur Mine Arnaud, et des manifestations ont été organisées tant par les pour que par les contre. Mais c’est à la manifestation d’appui au projet que s’étaient rendues les candidates libérale, péquiste et caquiste de la région lors de campagne électorale du printemps dernier — même si elles s’abritaient derrière la nécessité que les exigences du BAPE soient respectées.
Elles le seront, a finalement dit lundi le ministre du Développement durable et de l’Environnement, David Heurtel, flanqué du ministre des Ressources naturelles, Pierre Arcand, et du ministre délégué aux Mines, Luc Blanchette. Mais le dévoilement des études qui corrigent les lacunes notées par le BAPE est à venir et Québec ne nous dit pas comment il s’assurera que les engagements pris par Mine Arnaud seront respectés. On va de l’avant avant d’être transparent et, en cas de problème, il y aura un système de gestion des plaintes.
« Soyez rassurés… », répétait le ministre Heurtel. Mais ce n’est pas une affaire de confiance ! Il faut s’en tenir aux faits. Et ceux qui touchent la contamination de l’air et de l’eau, la stabilité des sols, le niveau sonore (il y aura une explosion par jour pendant les 28 années d’exploitation de la mine), la cicatrice en ville (la plus grande mine à ciel ouvert en zone habitée au Québec) et la viabilité économique même du projet (le prix de la tonne de phosphate qui sera exploité ne cesse de baisser vu l’importance de la production mondiale) n’ont pas été mis sur la place publique depuis le rapport du BAPE.
Et même s’il s’agissait de confiance… C’est le gouvernement qui, par l’entremise d’Investissement Québec, s’est lancé dans cette affaire pour créer, en partenariat avec la firme norvégienne Yara, Mine Arnaud inc. (Un troisième partenaire, exploitant de mine, se joindra à eux, apprenait-on lundi. Qui ? Encore le silence.) Les millions déjà investis par Québec et sa détermination à lancer le Plan Nord en se posant lui-même comme modèle à suivre annonçaient l’affaire entendue : non, le bras droit gouvernemental n’allait certainement pas bloquer ce que le bras gauche faisait ! Québec n’avait aucun intérêt à se montrer transparent, comme l’exigerait pourtant l’idéal démocratique pour un projet aussi important, aux conséquences environnementales indéniables et qui aura cours pendant des décennies.
On comprend que la région a besoin des emplois promis, et l’économie est évidemment un facteur dont il faut tenir compte. Mais le rôle des élus devrait être d’encadrer les entreprises avant de les applaudir, de rassurer les citoyens preuves à l’appui avant de donner des feux verts. Et d’avoir une vision moins univoque du développement : au XXIe siècle, s’assurer de la qualité de vie et de l’environnement, c’est aussi miser sur l’avenir et la prospérité du Québec.
MINE ARNAUD
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