Pauline Marois se raconte

056463805b444916bef02c13649ad036

Marois - "Québécoise !" - autobiographie


Pauline Marois présentait ses nouvelles couleurs politiques printanières à la sortie de l'Assemblée nationale, hier. Une allégeance que la chef du Parti québécois partage sans doute avec plusieurs de ses collègues de tous les côtés de la Chambre.

Photo Jean-Marie Villeneuve, Le Soleil

***
Québécoise!, l'autobiographie de Pauline Marois, aurait tout aussi bien pu s'intituler Résistante ou même Survivante, tant ont été nombreux les obstacles sur son chemin vers la direction du Parti québécois.


La chef péquiste a lancé hier son autobiographie, en marge du Salon du livre de Québec. Avec 250 pages, on est loin des pavés de l'automne de Brian Mulroney ou de Jean Chrétien.
Son objectif, «briser l'image de grande dame» et donner l'image d'une «femme de conviction, engagée... qui se souvient d'où elle vient!» Flatteuse, la photo de la couverture reprend cette image de luxe harmonieux, «c'est plutôt l'image d'une femme heureuse, sereine», explique Mme Marois. Dans une de ses chroniques, Lise Payette, son ancienne patronne, lui avait déjà conseillé de «porter l'uniforme» pour ne pas distraire ceux qui l'écoutent des idées qu'elle exprimait. Mme Marois a depuis mis au rancart ses foulards voyants et ses bijoux coûteux.
L'ouvrage publié chez Fides, grâce à la collaboration étroite de Pierre Graveline, brosse un tableau passablement bon enfant de cette carrière politique hors du commun. «Je ne voulais pas de règlements de comptes», a expliqué hier Mme Marois qui, comme politicienne, souligne «qu'on n'est pas obligé de tout dire».
«Je ne voulais pas donner de détails croustillants, je voulais raconter mon parcours. C'est mon histoire, je n'ai pas voulu faire l'histoire des autres.» L'ouvrage avait d'ailleurs été mis en chantier bien avant les élections de 2007, avant donc le départ d'André Boisclair et son retour, inattendu, à la tête du PQ en juin l'an dernier.
Des origines très modestes de la désormais châtelaine de L'Île-Bizard, qui avait échoué à ses cours de latin et d'anglais, déjà, jusqu'au plébiscite qui la porta à la tête du PQ. Mme Marois raconte, sans acrimonie, son parcours, avec une capacité étonnante de recréer, en quelques pages, l'ambiance d'épisodes révolus.
Les carnassiers, et les journalistes, resteront sur leur faim, prévient-elle. Elle raconte toutefois comment elle avait menacé de démissionner si Lucien Bouchard avait poursuivi sur son intention de sabrer les salaires des employés de l'État pour arriver au déficit zéro. Clairement, de tous les chef péquistes, c'est avec Lucien Bouchard que Mme Marois aura le plus de complicité. À la veille d'annoncer sa démission, en janvier 2001, il lui avait d'ailleurs conseillé d'annoncer rapidement sa candidature, de ne pas tergiverser, une hésitation qui permettra d'ailleurs à Bernard Landry de lui tirer rapidement le tapis sous les pieds. Encore aujourd'hui, elle explique qu'elle préfère toujours pouvoir prendre quelques heures de réflexion avant une décision importante. «C'est toujours meilleur si je peux prendre quelques heures ou quelques jours de plus. Je prends de meilleures décisions», résume-t-elle.
Sans insister, elle brosse un portrait sans ménagement de son actuel lieutenant, François Legault, qui lui avait proposé de faire un tandem pour succéder à Lucien Bouchard. Sans la prévenir, M. Legault s'était rallié à Bernard Landry, une décision qui lui avait coupé les jambes. «Mon objectif, ce n'est pas d'être tendre ou pas. Je ne porte pas de jugement, je raconte ce qui s'est passé», a-t-elle résumé hier. «Je ne me suis pas sentie trahie, mais j'ai été déçue», résume-t-elle.
En point de presse, elle s'étend un peu sur la crise du lobbying qui a frappé le gouvernement Landry au printemps 2002. Elle revient sur le départ forcé de Raymond Bréard, l'homme de confiance de M. Landry qu'elle avait publiquement exécuté, comme lobbyiste. «Il y avait un doute qu'il ait pu utiliser des informations privilégiées.»
Mme Marois avoue quelques erreurs; celle notamment d'avoir réclamé publiquement une course à la direction, en août 2004. «J'ai eu l'air de quelqu'un qui, par ambition, était prêt à faire la peau à son chef», rappelle-t-elle. Surtout, elle reconnaît sa frustration à l'époque. Bien des gens qui l'approuvaient en privé n'ont jamais voulu publiquement se joindre à la fronde contre Bernard Landry. Ce dernier avait d'ailleurs longuement hésité avant d'annoncer qu'il comptait rester en selle, après sa défaite d'avril 2003.
Elle avoue maintenant avoir été fort surprise de la démission de Bernard Landry, qui avait par dépit quitté la barre du PQ en juin 2005. Celui-ci ne jugeait pas suffisant l'appui de 76% que lui avaient donné les péquistes en congrès.
La course contre André Boisclair lui réservera d'amères déconvenues. Le jeune politicien, avant le départ de Landry, lui avait confié qu'il était loin d'être certain que ce poste le tenterait un jour. Quand André Boisclair conserva un appui important dans les sondages au moment où sa consommation passée de cocaïne alimentait un débat acrimonieux, Mme Marois sentit que les carottes étaient cuites. «Étant donné que cet événement ne nuisait pas à sa crédibilité, c'était pour moi terminé», raconte-t-elle aujourd'hui. Elle reconnaît facilement avoir été amèrement déçue de son score de 30% des délégués le soir du congrès. «J'étais blessée, mais je n'avais personne d'autre à blâmer que moi-même», explique-t-elle désormais.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé