Ainsi donc, des membres du GAP-QI ainsi que certains journalistes pensent que le débat sur la citoyenneté québécoise et sur les accommodements raisonnables dérive. Ils pensent que de mettre en place des mesures d'intégration des immigrants et d'enchâsser dans une constitution québécoise les valeurs de laïcité et d'égalité entre hommes et femmes seraient une erreur. C'est à n'y rien comprendre.
Lorsque nous avons lu le projet de loi sur une constitution du Québec déposé par Daniel Turp et le projet de loi sur l'identité québécoise déposé par madame Marois, nous étions plutôt enthousiastes. Sans dire qu'il n'y a aucune amélioration à apporter, nous n'aurions tout de même jamais pensé que des militants du parti en viennent à contredire publiquement leur chef sur une question comme celle-là.
Comme citoyens issus de l’immigration, nous nous sommes toujours battus contre le racisme et l'intolérance. Nous avons fait ce choix en nous disant qu'une société juste se veut une société où tous sont soumis aux mêmes lois sans égard à leur orientation sexuelle, leur origine ethnique, leurs croyances religieuses et ainsi de suite. Selon nous, c'est cette vision de la société qui garantit une vraie justice et à partir du moment où on fait des exceptions, on contrevient directement au principe de dignité et d'égalité en droit des êtres humains.
Qu'on se comprenne bien, nous sommes pour la liberté individuelle et la liberté de religion. Cependant, on ne doit jamais se permettre d'utiliser cette liberté comme d'un moyen pour pouvoir contrevenir aux lois du Québec car, ce faisant, nous risquons de briser la cohésion sociale. La loi ne fait pas d'exception et ne s'adresse pas non plus à un groupe spécifique de personnes; elle est cohérente pour tous et s'applique à tous. C'est de cela dont il est question lorsque l'on dit que l'État se doit d'être laïc. D'ailleurs, une constitution qui jette de telles bases pour la société québécoise est une des meilleures initiatives du Parti québécois depuis des lustres.
Lorsque l’on fait le choix de se battre contre la discrimination, on se bat aussi contre le communautarisme à la Trudeau qui a isolé les immigrants du débat public et qui les a placés dans des ghettos sociaux. La forme la plus perfide de racisme, c'est de ne pas donner aux nouveaux arrivants les outils qui leur permettraient de s'intégrer pleinement à la vie citoyenne. C'est d'ailleurs cet état de fait qui explique la situation dans laquelle nous sommes plongés depuis plusieurs mois. Dire qu'un citoyen devrait avoir une maîtrise correcte du français n'est pas non plus du racisme, c'est d'affirmer le contraire en cautionnant des coupures dans les programmes de francisation qui l'est. En ce sens, ce n'est pas une coïncidence si, même le gouvernement fédéral, demande une maîtrise suffisante du français ou de l'anglais avant d'accorder la citoyenneté canadienne.
Il faut ajouter à cela qu'il y a une forte concentration de gens issus de l'immigration qui, somme toute, ont un niveau semblable de scolarité et qui vivent dans une grande pauvreté sans jamais pouvoir s'en sortir. Il n'y a qu'à regarder ce qui se passe dans le quartier Parc-Extension à Montréal. Ce quartier est le plus pauvre du Canada tout en étant un des endroits comportant le
plus grand nombre d'immigrants. Permettre à une telle situation de perdurer est contraire aux principes de l'État de droit démocratique et c'est contre cela que l'on se bat lorsque l'on présente un projet de constitution québécoise. On affirme ainsi que l'État a la responsabilité d'accompagner les immigrants et de faire en sorte que les citoyens aient la capacité de s'exprimer en français.
Bref, de dire que le Parti québécois dérive avec ses projets de loi 195 et 196 est une grave erreur. Certes, le jeu des adversaires sera de faire croire que ce parti est intolérant et divisé, mais ne nous trompons pas et essayons plutôt de voir la manoeuvre. En effet, il s’agit ici du même procédé tendancieux auquel les fédéralistes ont généralement eu recours pour faire croire que le PQ est un parti raciste. Or, il n'en est toujours rien.
En conclusion, certains journalistes auront beau tirer à boulet rouge sur le français comme langue d'accueil des immigrants, il faut demeurer impassible sur cette question-là. En effet, le français reste à ce jour le meilleur moyen d'intégrer les nouveaux arrivants à la vie citoyenne; et le fait que cette question soit centrale dans les projets de loi 195 et 196 est un pas dans la bonne direction. À moins, évidemment, que l'on préfère faire comme le gouvernement fédéral a fait récemment, c'est-à-dire continuer à ghettoïser nos immigrants en construisant, sur le boulevard Rosemont à Montréal, des habitations réservées exclusivement aux nouveaux arrivants d'Asie du Sud-Est.
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Paolo Zambito
Ancien attaché politique du député de l'Assomption et trésorier du Mouvement Montréal français.
Farid Salem
Président de Solidarité Québec-Algérie et ancien vice-président du Parti québécois de Viau.
Juan José Hernandez
Ancien membre du conseil scolaire de l'île de Montréal et ancien président du Bloc québécois d'Outremont.
Pierre Biacchi
Militant de la Société Saint-Jean-Baptiste et membre du Parti québécois.
Pour la citoyenneté et la langue française
Lettre ouverte aux éditorialistes et au Groupe d'action politique des Québécois issus de l'immigration du Parti québécois (GAP-QI).
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