L'Avenir du Québec

Une affaire de statut

Ni idéologie, ni sentimentalité

E326384968af1c13632068966e0ac4ba

Assumer les changements qui s'imposent du fait de la réalité

Dans le cadre de la vie collective québécoise, un référendum s’inscrit dans la géopolitique du territoire concerné. C’est une question statutaire, une affaire de statuts et de principes : ce n’est pas une question idéologique ou sentimentale.
La géopolitique est le fondement sans lequel il ne peut y avoir de politique. De simples colons dans une colonie française, puis anglaise, les descendants des colons de Nouvelle France sont devenus un peuple, grâce à leur investissement continu qui a transformé en un véritable pays un territoire littéralement inhabitable à l’état sauvage, localisé en périphérie par rapport aux deux Amérique en général et par rapport à l’Amérique Britannique du Nord en particulier.
La contribution des Québécois au développement des canaux et chemins de fer dans l’Amérique Britannique du Nord est presque partout à l’origine du développement de provinces qui ont maintenant atteint la stature de véritables États.
Le Canada est un continent. Comme l’Europe et la Scandinavie, il était appelé en partant à la genèse de plusieurs États nouveaux dans l’échiquier d’un monde en perpétuelle mutation.
C’est au terme de plusieurs siècles et parfois de plus d’un millénaire d’action continue qu’une population devient un peuple, qu’un peuple devient nation et qu’une nation se dote des assises de son propre État et finit par être reconnue et agir comme tel.

La poursuite des mêmes continuités a fait que le peuple du Québec est devenu une nation maintenant reconnue, alors que ses pires ennemis, ceux de l’intérieur, cherchent à l’ignorer. Partant, la nation québécoise s’oriente vers le statut d’État.
Ce n’est ni du séparatisme, ou sécessionnisme ou autre idéologie en isme : c’est un Acte qui surgit au terme de 400 ans de continuités. Il y a déjà 194 États reconnus dans le monde, dont la majorité sont nés de récente date.
Et il y en aura d’autres car le pouvoir étant complètement dans ses communications, tout changement majeur dans les communications, comme les développements que nous vivons maintenant, entraîne derechef un déplacement des bases des pouvoirs existants.
Le développement des communications, la maturité et les prises de conscience ont fait tomber les anciens empires et ont permis la naissance de nouveaux États, plus proches de leurs œkoumènes, et par conséquent, plus naturels et moins gouvernée par l’arbitraire des Empires et des États post-impériaux, dont celui d’Ottawa que les provinces canadiennes commencent depuis plusieurs décades à remettre en question. C’est le signe d’un progrès. Ce n’est pas une révolution.
Si, par rapport au reste du Canada, le Québec prend de l’avance en matière de statuts reconnus et à reconnaître, c’est parce que sa géographie, son histoire, sa langue, sa culture et le développement de ses communications ont incité sa population à évoluer statutairement plus rapidement qu’ailleurs dans les autres provinces.
Attention cependant : l’Ontario n’est plus la loyaliste qu’elle était. Les Ontariens aussi remettent en question la pertinence d’entretenir et de se laisser gouverner par deux capitales. De même la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve, la Saskatchewan, l’Alberta et la Colombie- Britannique. Ces provinces ont-elles aussi atteint la stature de véritables États, que leurs populations en aient pris conscience ou non.
Une transition majeure est déjà amorcée. Elle ne doit pas devenir l’occasion de troubles et de règlements de compte comme cela arrive trop souvent chez les populations et les dirigeants qui, manquant de maturité, sont incapables d’assumer les changements qui s’imposent. Dans le cas du Québec et du Canada, il y a énormément de travail à faire et rien ne sera plus comme avant.
Madame Marois le sait, et je sais qu’elle le sait.
Cependant, elle sait aussi qu’elle doit procéder en douceur afin de ne pas heurter les susceptibilités et les craintes de celles et ceux qui ne savent pas que toute véritable nation peut connaître des changements susceptibles de confirmer son existence comme Pouvoir territorial et conscience économique et politique fondé sur des bases permanentes et solides pour l’avenir. Elle a grande confiance aux Québécoises et aux Québécois, mais elle doit quand même procéder délicatement.
Les politiciens des autres partis diront bien ce qu’ils voudront. N’ayant aucune connaissance des réalités statutaires et ignorant les principes fondamentaux qui gouvernent toute stratégie d’envergure, donc d’État, ils ne peuvent que nous faire retomber dans les mêmes ornières et recommencer sans fin.
René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique, et auteur.

Featured 751d93ca198caacf4590a022022f5bc8

René Marcel Sauvé217 articles

  • 248 963

J. René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique et en polémologie, a fait ses études de base à l’institut de géographie de l’Université de Montréal. En même temps, il entreprit dans l’armée canadienne une carrière de 28 ans qui le conduisit en Europe, en Afrique occidentale et au Moyen-Orient. Poursuivant études et carrière, il s’inscrivit au département d’histoire de l’Université de Londres et fit des études au Collège Métropolitain de Saint-Albans. Il fréquenta aussi l’Université de Vienne et le Geschwitzer Scholl Institut Für Politische Wissenschaft à Munich. Il est l'auteur de [{Géopolitique et avenir du Québec et Québec, carrefour des empires}->http://www.quebeclibre.net/spip.php?article248].





Laissez un commentaire



7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    16 mars 2014

    Monsieur Rix,
    Aucune force ne m'a emmené à Toronto. Je venais de prendre ma retraite après
    28 ans de service comme officier dans l'armée canadienne. J'avais servi au
    Canada, en Europe, en Afrique Équatoriale et au Moyen Orient, et j'avais
    profité de mon service militaire pour poursuivre mes études, tantôt comme
    étudiant externe et tantôt à temps plein pendant les congés.
    En quittant, ayant eu beaucoup d'expérience comme instructeur aux armes
    combattantes, dont l'infanterie et comme professeur d'histoire militaire dans
    un collège militaire, j'ai cru poursuivre une carrière de prof au Québec, étant
    montréalais d'origine mais personne ne voulut m'engager, Une fois dans
    Le Devoir, il y avait une annonce demandant un géographe de langue française
    pour Toronto. J'ai été engagé tout de suite, avec pleine liberté de faire ce que
    je voulais. Par exemple: chaque année en mars, je pouvais emmener mes
    étudiants dans un voyage lointain: URSS, France, Italie, Chine, États Unis, Grèce
    et Égypte. J'aurais fait la même chose au Québec mais j'étais et je demeure
    suspect à cause de ma géopolitique apprise en Angleterre et en Europe.
    Même les indépendantistes ont mis beaucoup de temps à me faire confiance.
    Finalement, c'est Pierre Falardeau et son ami René Boulanger qui m'ont rejoint
    à Toronto et m'ont demandé de revenir au Québec, au moment ou je terminais
    un engagement.
    J'avais fait des travaux de recherches sur les effets à long terme de la construction
    du canal Érié aux États Unis en 1825. Ces travaux ont été qualifiés de
    "déterminisme".
    J'ai décidé qu'il était plus commode de poursuivre et devenir auteur.
    JRMS


  • Archives de Vigile Répondre

    15 mars 2014

    Mr Sauvé, j'aime beaucoup votre façon de poser la question nationale et son caractère dynamique. J'ajouterais que les changements technologiques dans les modes de communication modifient sensiblement la donne géographique. Avions, satellites, internet, ordinateurs et méga-villes ont refaçonné la topographie. Il y a un autre facteur qui me parait déterminant: les pays dont la cohésion repose sur une langue forte comme l'Allemagne, le Japon, la Corée, la Chine ont une économie robuste.
    En termes de systèmes, une condition préalable pour qu'il y ait un organisme (ou un pays) est que les forces internes de cohésion dépassent les forces externes de dilution.
    Quelle force de cohésion amène un francophone à prendre un emploi à Toronto? Je vous laisse tirer les conclusions. Et n'oubliez pas que toute la planète a accès à Internet. . .

  • Archives de Vigile Répondre

    14 mars 2014


    Ce que j'écris n'est enseigné dans aucune école au Québec. Je l'ai appris à l'Université de Londres, en Allemagne et en Autriche.
    Personne. excepté Marc-Aimé Guérin, n'a voulu publier Géopolitique et avenir du Québec. Sitôt publié en 1994, le livre a disparu des tablettes des librairies d'Ottawa et des environs.
    Personne dans les universités québécoises ne devait enseigner ce qui est écrit dans Géopolitique et avenir du Québec. "C'est du déterminisme" a dit un savantasse de l'Université de Montréal et mon cas était réglé.
    On ne me permet pas même de me défendre en public et pourtant, il est facile de se défendre contre l'étiquette de "déterminisme".
    Très simple: la géopolitique a pour objet la RÉALITÉ,DONT les caractéristiques sont les suivantes:
    Radicalité, ipséité, semelfactivité, continuité et
    royauté.
    IL N'Y A AUCUN DÉTERMINISME DANS LA RÉALITÉ, sa radicalité, etc.
    Si je vous dis: il y a un mur devant vous et que vous me répondez: "C'est votre opinion. Vous avez droit à votre opinion et chacun a droit à son opinion".
    Pas de problème: Si le mur en avant de vous n'est qu'une opinion, allez vous péter la tête dedans et vous verrez s'il n'est qu'une opinion. De même pour toute la réalité.
    La géopolitique tire son origine des enseignements d'Aristote, qui voyait des liens géographiques entre les caractéristiques d'un État et sa géographie.
    Comme l'enseigne Yves Lacoste, géographe de ma génération (les années trente: j'ai 83 ans sonnés) la connaissance de la géographie est nécessaire à la compréhension des pouvoirs. Le big business connaît bien la géographie mais une vaste majorité de gens ne la connaissent pas.
    En quittant l'armée pour la retraite, j'ai été incapable de trouver un emploi au Québec mais j'ai été tout de suite engagé à Toronto pour enseigner géographie générale et géopolitique avec trois fois le salaire que j'aurais fait au Québec. Mes meilleurs étudiants-es: des Juives, à qui on m'avait demandé d'enseigner en français encyclopédique.
    J'essaie encore de faire pénétrer la géopolitique au Québec. Vous comprendrez facilement pourquoi on s'y objecte: c'est le seul véritable cheminement vers l'État.
    JRMS

  • Claude G. Thompson Répondre

    14 mars 2014

    M. Sauvé.
    Votre exposé m’a rappelé la rencontre que j’eus avec vous, en compagnie de mon ami Ivan Parent, il y a quelques années. Cette rencontre nous fit voir et comprendre pour la première fois combien nous étions en droit de revendiquer haut et fort notre titre de nation, et combien notre désir de lui donner le pays qui lui revenait était et demeure légitime. Encore une fois, votre intervention d’aujourd’hui nous démontre le bien-fondé de notre affirmation nationale et la légitimité de notre démarche vers l’indépendance.
    Le Québec a ses mentors et vous en faites partie. Votre vie, votre carrière, vos efforts pour nous éveiller à notre identité et à notre affirmation nationale, couplés à la pédagogie de l’indépendance dont vous vous êtes fait un communicateur convaincant et crédible continuent de m’inspirer et me convainquent plus que jamais du bon droit qu’est le nôtre de faire du Québec un pays; notre pays.
    Merci pour cette inspirante intervention. Puissiez-vous continuer à nous éveiller au meilleur de ce que nous sommes, de ce que nos ancêtres nous ont légué et de ce que nous nous devons d’en faire; un pays libre, prospère, inspirant pour les autres nations et enfin libéré de la tutelle de ses conquérants.
    Patriotiquement vôtre,
    Claude G. Thompson

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mars 2014

    M. Sauvé,
    Dans un commentaire issu d'un texte précédent, je relatais justement qu'il y avait un certain temps que l'on ne vous avait pas lu. J'en parlais tout à l'heure avec mon ami Claude Thompson. Au moment de notre rencontre certains éléments de votre discours nous apparaissaient quelque peu contestables cependant, avec le temps, nous devons nous rendre compte de la réalité et apprécier votre justesse de vue.
    Vous avez une expérience hors du commun de la géopolitique et vous nous avez instruit sur ce qui se passe dans notre beau Québec et inciter à ne pas perdre confiance dans son avenir. À mesure que nous avançons sur ce chemin tortueux vers la lumière de notre libération, vos avis sont de plus en plus pertinents et j'émets le souhait que vous conserviez la santé et que vous puissiez continuer à inspirer la démarche des Québécois comme vous avez tenté de le faire depuis tant d'années.
    M. Sauvé, merci de votre apport.
    Respectueusement vôtre,
    Ivan Parent

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mars 2014

    Ah, si tous les québécois et québécoises pouvaient lire et surtout comprendre votre écrit, que de pas en avant ferions-nous!
    MERCI INFINIMENT POUR VOTRE CONTRIBUTION ET CONTINUEZ À PORTER HAUT LA LANTERNE POUR NOUS ÉCLAIRER

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mars 2014

    Je n'ai pas d'autres mots que, Merci, encore une fois.