CHRONIQUE DE LA CROQUEUSE DE MOTS

Vous avez dit...: "Re-bonjour, Pauline" ? (2)

Chronique de Thérèse-Isabelle Saulnier


L'affirmation du nous, le modèle d'intégration, la raison évidente de faire l'indépendance face aux sempiternels blocages fédéraux, et la nécessaire cohésion des forces souverainistes à ré-unir, à consolider et à financer, voilà, pour moi, de bonnes raisons de revenir au PQ et d'enfin pouvoir dire: "Re-bonjour, Pauline!" - Mais j'hésite encore, malgré tout... Je ne suis pas encore certaine que le PQ se soit vraiment engagé sur la voie du COURAGE POLITIQUE, surtout si l'on tient compte de ce qu'il dit dans son mémoire sur les accommodements. Je pense donc que je devrai attendre jusqu'en mars prochain, après le conseil national du PQ et les décisions qui y seront prises. Et peut-être même faudra-t-il attendre jusqu'après le rapport Bouchard-Taylor et les réactions qu'il suscitera...
LES RAISONS D'ATTENDRE
1) Encore et toujours la même peur d'appeler les choses par leur nom... (Ce n'est pas là du courage politique!)
• Le PQ se contente d'écrire que "certains accommodements heurtent de plein front la société québécoise et suscitent un malaise profond vs l'égalité hommes-femmes". Quant à savoir lesquels, on peut toujours chercher! Pas un seul n'est mentionné! Et comme l'a fait remarquer récemment quelqu'un sur Vigile, ce que l'on ne nomme pas s'oublie. - Encore une chance que j'aie fait la liste desdits accommodements il y a un an! Comme ça, je peux remplir, aujourd'hui, mes trous de mémoire!!.
• En ce qui concerne les accommodements allant à l'encontre de l'égalité entre hommes et femmes, le PQ n'en nomme pas un seul et nous réfère simplement au mémoire du CSF, dont il dit partager les préoccupations. - Au moins, soyons positifs, on nous considère assez intelligents pour aller voir nous-mêmes de quoi il s'agit! - Mais tout de même... - Lecture faite du mémoire du CSF, les préoccupations du PQ sont donc centrées sur le fait que la liberté de religion puisse avoir pour effet d'aller à l'encontre de l'égalité des sexes. Le CSF propose alors que: "une norme entravant une pratique religieuse ne devrait pas être jugée contraire à la liberté de religion si elle a pour objet ou pour effet de protéger le droit à l'égalité entre les sexes". (Ce qui implique, dit aussi le CSF, de "définir l'objet de la liberté de religion", ce qui signifie sans doute de préciser ce qu'elle comprend et ce qu'elle exclut. Mais là-dessus, pas un mot...) - Deux exemples sont fournis par le CSF: le niqab, à ne pas tolérer pour une enseignante, et ne jamais accepter une demande de ne pas se faire servir par une femme. - Il faut croire que le PQ est d'accord avec cela, même s'il n'ose pas le dire. - Rectitude politique, quand tu nous tiens...
• Toujours dans la ligne du CSF, qui serait celle du PQ, les deux principales recommandations du Conseil sont: (3) – Que les représentantes et les représentants ou les fonctionnaires de l’État ne puissent arborer de signes religieux ostentatoires dans le cadre de leur travail. (4) – Que soit amendée la Charte des droits et libertés de la personne afin d’y insérer une disposition analogue à celle de l’article 28 de la Charte canadienne, affirmant clairement que l’égalité entre les femmes et les hommes ne peut être compromise au nom, notamment, de la liberté de religion. - On sait que cette dernière recommandation a déjà été prise en charge par le gouvernement libéral actuel. Quant à la 3, le PQ se dit d'accord en principe, mais hésite à se prononcer fermement et laisse le soin à la Commission de proposer quelque chose...! - Peur d'avancer, quand tu nous tiens...
• En ce qui concerne la laïcité et le port de symboles religieux, le PQ précise que tout ce qui relève du patrimoine religieux (surtout les églises) doit être conservé et préservé . (Comme s'il s'agissait de faire disparaître tous les édifices religieux... pffft!) - Selon le PQ, la laïcité ne signifie pas l'interdiction de toute expression religieuse dans les lieux publics, du moins tant que cette expression "n'impose pas aux autres des comportements contraires aux valeurs communes des Québécois et Québécoises". - Nous voici bien avancés! A quoi fait-on allusion, ici? - Peur des mots, quand tu nous tiens...
• Pour les accommodements allant à l'encontre des valeurs fondamentales de notre société, le PQ n'est pas plus bavard, ni précis. Mais puisqu'il nous dit partager les préoccupations du CSF, ce dernier, là-dessus, affirme que la liberté de religion "peut être subordonnée au respect de préoccupations sociales supérieures". - Bon! Allez déchiffrer cela pour éclairer ce que cela signifie concrètement! Est-ce l'art de la litote, ou celui de parler pour ne rien dire?? - Dans les deux cas, c'est insatisfaisant, d'autant plus qu'il y a un sérieux problème sémantique à résoudre, en ce qui concerne les valeurs dites communes ou fondamentales, que tout le monde dit partager. La liberté, oui, bien sûr! Mais liberté de quoi et jusqu'où? L'égalité de tous et toutes, oui, certainement! Mais que signifie cette égalité, particulièrement entre hommes et femmes, surtout lorsque certains systèmes de pensée affirment qu'il y a une différence de nature entre hommes et femmes et que cette différence, voulue par Dieu en personne, implique une différence de droits?? - Comme vous le voyez, on est loin d'être sortis du bois! - Terrorisme verbal, quand tu nous tiens...
2) Une intégration bien mitigée, dans un cadre bien politiquement correct...
• Si les immigrants, montés à bord du train de l'histoire du Québec, viennent "se joindre à la grande aventure québécoise" dont le coeur est "cette culture, ce parcours, cette identité" établie ici depuis 400 ans, le PQ précise que cette intégration se fait en respectant leurs particularités, leurs droits et leurs convictions religieuses, tout autant que nos valeurs fondamentales. - Bon. Cela est très politiquement correct, mais qu'est-ce que ça veut dire, CONCRÈTEMENT, en regard de telle et telle demande d'accommodement? Et quelles sont celles, surtout, qui vont à l'encontre de ces valeurs? - Rien, absolument rien là-dessus: on ne se mouille pas ne serait-ce que le bout de l'orteil! Car il s'agit de savoir quelles convictions sont "respectables et respectueuses" de nos valeurs! Mais là-dessus, silence complet, comme partout ailleurs. Vraiment, tout le monde se gargarise de beaux et bons mots, en ayant bien soin de taire les faits et de se cantonner dans le flou des principes! Je plains vraiment les commissiaires et leur groupe d'experts pour s'inspirer de tels mémoires! - Quand on parle pour ne rien dire...
3) Des mesures bien timides...
• Inclure dans la charte un nouveau droit, celui de l'apprentissage du français, ça fait très bien, très cool, mais aussi pas mal trompe-l'oeil... - sans compter que la langue parlée et comprise N'EST PAS la cause de toutes ces demandes problématiques d'accommodement... La question n'est pas là, et il serait temps de se défaire de cette marotte, répétée à satiété, de proclamer que l'étape 1 de l'intégration, c'est l'emploi. Ce dernier N'EST PAS davantage la cause des accommodements problématiques.
• Renforcer la loi 101, c'est bien beau à dire, mais ... le fait d'y ajouter l'obligation de francisation pour les entreprises de 25 à 50 employés aussi (même demande chez Québec solidaire) ne changera rien aux demandes d'accommodement. Le problème, la cause du problème n'est pas là.
• Dire qu'il faut trouver des moyens de rejoindre les femmes au foyer, particulièrement les immigrantes, c'est en dire bien peu alors qu'on ne mentionne même pas un seul de ces moyens! - Et encore moins en quoi cela concerne la question des accommodements. En fait, ces moyens contribueraient essentiellement à franciser ces femmes, dans le but de favoriser l'intégration plus rapide des familles à la société francophone.
• Parler de la pratique et de la fréquentation des arts à l'école (autre point commun avec Québec solidaire) pour promouvoir la culture québécoise, élaborer une nouvelle politique nationale de la culture québécoise et instaurer des mesures pour favoriser l'apprentissage et la valorisation de cette culture, est-ce une façon de régler la question des accommodements? Avec un arrivage sans cesse renouvelé de 55,000 immigrants par année, c'est fort douteux!
• Enfin, le PQ propose de baliser les accommodements en donnant des directives aux administrations, mais aucune n'est mentionnée, sauf un principe bien général à inclure, comme clause interprétative, dans la Charte québécoise des droits et libertés: «Dans l’interprétation et l’application de la Charte des droits et libertés de la personne, il doit être tenu compte du patrimoine historique et des valeurs fondamentales de la nation québécoise, notamment de l’importance d’assurer la prédominance de la langue française, de protéger et de promouvoir la culture québécoise, de garantir l’égalité entre les femmes et les hommes et de préserver la laïcité des institutions publiques».- Puis-je vous dire que je suis bien contente de ne pas être une administratrice devant gérer une telle clause?
Bref, pas plus que les autres partis (PLQ, QS et NPD) qui ont déposé un mémoire à la Commission B-T, le PQ ne fait preuve de courage politique. Je pense, entre autres, à une mesure qui aurait pu être mise de l'avant: l'obligation de fréquenter l'école française jusqu'au cégep inclusivement. - Meu non! Bien trop politiquement dangereux, cela! On préfère se réfugier, en toute sécurité, derrière de beaux principes sur lesquels tout le monde s'entend, et éviter de proposer toute solution concrète... Que Mme Marois continue donc de se faire conseiller par des Gérald Larose, et je lui suggère, comme conseillère numéro 1, nulle autre que... Denise Bombardier! Quand celle-ci frappe, au moins, elle vise - et atteint - LA cible!


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2008

    Depuis 30 ans j'entends tous les politiciens et politiciennes du pays, Québec inclus, dire, écrire, chanter, crier "Les femmes sont égales aux hommes ." Ce slogan, car il s'agit bien d'un slogan, ou d'une promesse électorale est un simili cri du coeur de tous les partis politiques. Leur faudrait dire, écrire, chanter, crier pour témoigner de leur réelle volonté d'atteindre l'objectif :"Une policière peut et doit arrêter, parler, ordonner à un homme peu importe sa religion." Ou "Une infirmière peut et doit soigner un homme peu importe sa religion." Ou: "Une réceptionniste peut et doit parler à un homme peu importe sa religion." Depuis un an en particulier aucune personne élue n'a osé dire de telles vérités. À croire que Mustapha Kemal Ataturk avit bien raison de dire:"Les politiciens qui ont besoin de la religion pour gouverner sont des lâches." À noter qu'à l'époque d'Ataturk le mot politicienne n'existait pas.
    André Drouin Hérouxville

  • Raymond Poulin Répondre

    25 janvier 2008

    Monsieur Bousquet,
    Au fond, votre seule raison de promouvoir une confédération plutôt que l'indépendance repose sur votre conviction que les Québécois «ont trop peur économiquement de ça».
    Il serait temps que les Québécois sachent qu'environ 80% de leurs exportations prennent le chemin des USA, 10% celui du Canada et 10% celui de toutes les autres destinations. En revanche, ils achètent davantage du Canada que le Canada n'achète du Québec, de sorte que l'argument économique, pour ce qu'il vaut, est à retourner comme une crêpe. Voilà un fait que les indépendantistes auraient intérêt à répandre, et d'abord ceux qui se servent du contraire comme argument pour se contenter d'un succédané d'indépendance.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2008

    Il y a eu beaucoup d'autres raisons d'avoir quitté le PQ comme les fusions forcées parce que ça a fait augmenter légèrement son compte de taxes ou parce qu'il y a eu la loi du territoire agricole quand on voulait séparer sa terre en lots pour y construire des bungalows ou parce qu'on soupçonnait le chef de n'être pas assez souverainiste ou parce qu'on était pour un référendum quand il n'y en avait pas d'annoncé ou quand on n'en voulait pas et qu'il y en avait un de promis ou quand le parti était trop à gauche ou trop à droite ou...la liste est sans fin. Faites confiance à un péquiste "pur de l'option" pour se trouver une bonne raison. Dehors le chef que je viens d'élire !
    Si on est indépendantiste/souverainiste avant tout, il est logique de voter pour le PQ, si on est fédéraliste avant tout, il est logique de voter Libéral très provincial, si on hésite trop entre les deux, il faut tirer ça à pile ou face ou rester à la maison.
    Moi, je suis pour une vraie confédération. Le premier parti qui choisit cette solution ou qui s'en rapproche le plus, il va avoir mon vote parce qu'il a de meilleures chances d'y arriver.
    Actuellement, ça pourrait être le PQ s'il conserve l'association ou le partenariat ou l'ADQ s'il explique comment il va faire pour collecter tous les taxes et impôts des Québécois, élargir notre présence internationale, adopter une citoyenneté et une constitution québécoise à l'intérieur du Canada et limiter le pouvoir du fédéral de dépenser "sans avoir recours à un ou des référendums", ce qui n'est pas trop loin d'une vraie confédération aussi.
    Le plus chanceux serait une entente constitutionnelle entre le PQ et l'ADQ. La souveraineté pure et dure sans aucune forme d'association canadienne, oubliez ça, les Québécois ont trop peur économiquement de ça. Ça peut être beau dans son livre mais pas sur le terrain.