Montréal, Québec. Deux villes. Deux histoires électorales tout à l’opposé. Denis Coderre est le nouveau maire de Montréal. Élu avec une courte majorité, il aura à composer avec l’opposition. À l’inverse, Régis Labeaume a été plébiscité par les électeurs de la capitale nationale, qui sont restés sourds aux appels de l’opposition.
Après la période noire que venait de vivre leur ville, tous les Montréalais partageaient le désir de lui redonner l’autorité politique qui doit être celle d’une métropole. Mais ils se sont montrés méfiants. Pas question de plébisciter qui que ce soit. Au contraire, ils ont partagé leurs votes, n’accordant à Denis Coderre qu’une faible majorité sur ses deux plus proches adversaires, Mélanie Joly et Richard Bergeron. Au surplus, ils ne lui ont pas donné la majorité qu’il espérait au conseil municipal. Leur méfiance s’explique et durera certainement plusieurs années.
Le premier défi du nouveau maire sera de rétablir un lien de confiance entre les Montréalais et leurs élus. D’abord l’intégrité. Denis Coderre a sa manière, le « filtre Coderre », qui, on l’a vu, est imparfait. Des questions ont été soulevées aux derniers jours de la campagne sur certains de ses candidats. Son prochain rendez-vous est la composition du comité exécutif de la Ville. Il devra faire un sans-faute. Il a aussi sa solution avec la création du poste d’Inspecteur général, dont le titulaire aura des pouvoirs d’enquête. Mais il lui faudra faire plus. La collusion a pu prendre racine à l’hôtel de ville en raison de modes de gestion d’une autre époque. Un grand ménage s’impose. En campagne, il reconnaissait que Marcel Côté, de Coalition Montréal, avait de bonnes idées. À lui de s’en inspirer.
L’autre grand défi du nouveau maire sera de mobiliser l’ensemble de la communauté montréalaise autour de la relance de Montréal. Il donnera un signal d’inclusion en invitant des conseillers issus des formations adverses à siéger au comité exécutif. Sans majorité au conseil où Projet Montréal formera l’opposition officielle, il lui faudra trouver des modus vivendi. L’appui modeste obtenu des Montréalais devrait lui avoir fait comprendre qu’il ne pourra diriger Montréal seul.
Une qualité de Denis Coderre le populiste est de savoir être à l’écoute de ses concitoyens. Cela lui servira pour rassembler et créer des consensus, lesquels ne peuvent se réaliser dans l’affrontement, ce qu’il a bien compris en refusant de s’associer à la campagne de Régis Labeaume contre les syndicats d’employés municipaux.
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La victoire de Denis Coderre était attendue dès le début de cette campagne. Pas la « victoire morale » obtenue par Mélanie Joly. Venue de nulle part, elle a battu aux points le vétéran Richard Bergeron, dont le rêve de mettre en œuvre le programme de Projet Montréal s’estompe. Il y a une leçon à tirer du phénomène Joly. N’y voyons surtout pas un feu de paille. Les Montréalais, en votant pour elle aussi massivement, ont exprimé leur désir de voir un changement profond de la classe politique.
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À Québec, l’ampleur du mandat donné à Régis Labeaume n’est pas sans donner le tournis. Cela nous rappelle les résultats de cette élection de 1970 à Montréal tenue en pleine Crise d’octobre. Jean Drapeau avait écrasé une opposition assimilée au terrorisme. Rien ne pouvait plus l’arrêter.
Le maire Labeaume n’avait pas d’adversaire. Il s’en est créé un en bâtissant sa campagne sur l’affrontement avec les syndicats des employés municipaux. Le climat de polarisation qu’il a créé ne donnait guère le choix. Ou on votait pour Régis Labeaume ou on votait contre lui, ce qui équivalait alors à appuyer les syndicats. Il a fait de cette élection un référendum.
Les électeurs de Québec lui ont donné une arme puissante. Dangereuse même pour peu qu’il se laisse emporter par son pouvoir. Il lui faudra la manier avec circonspection. Ses objectifs de réduction des dépenses et de la dette de sa ville sont légitimes. Il a maintenant un rapport de force, mais rappelons-lui qu’il y a d’autres avenues que l’affrontement.

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