Les chercheurs ne sont pas convaincus que les programmes d'immersion doivent être étendus à l'ensemble des enfants.
Photo: François Roy, Archives La Presse
Mathieu Perreault La Presse - L'immersion linguistique serait surtout profitable aux premiers de classe, mais ne désavantagerait pas les élèves ayant des problèmes d'apprentissage, selon des études présentées au congrès international de la Société de recherche sur le développement de l'enfant, qui s'est terminé samedi au Palais des congrès. Toutefois, les chercheurs ne sont pas convaincus que ce type de programme doit être étendu à l'ensemble des enfants.
«L'expérience anglophone au Québec a permis de vérifier plusieurs théories sur l'immersion, explique Fred Genesee, professeur de psychologie de l'Université McGill. On craignait au départ que seuls les enfants ayant des troubles d'apprentissage se retrouvent dans les classes normales, parce qu'ils seraient les seuls à ne pas pouvoir suivre en immersion. Mais ça ne s'est pas produit, parce que ces enfants n'ont pas plus de problèmes en immersion. Leurs notes ne s'améliorent pas, mais ne baissent pas.»
Les enfants ayant des difficultés d'apprentissage de leur langue maternelle adoptent même les tics caractéristiques d'un problème d'apprentissage d'une langue seconde. «En français, les enfants vont avoir de la difficulté avec les articles, dit M. Genesee. En anglais, ce sont les temps de verbes qui posent problème. Les francophones qui ont des problèmes d'apprentissage linguistique vont se retrouver avec les mêmes problèmes que leurs semblables anglophones: ils vont mélanger les articles en français et les temps de verbes en anglais.»
Ces résultats ne signifient pas que l'immersion devrait être généralisée, explique Catherine Snow, psychologue de l'Université Harvard qui a organisé la séance sur l'immersion au congrès. «Les enfants ayant de moins bonnes notes, qui se retrouvent souvent dans les milieux défavorisés, ne vont pas acquérir beaucoup plus une langue seconde en immersion. Ça fonctionne surtout pour les bons élèves et pour ceux des milieux aisés, qui ont plus de soutien parental pour leurs études. Je pense qu'il vaut mieux améliorer l'apprentissage de la première langue chez les élèves les moins forts que de dépenser tout cet argent pour l'immersion.»
Des recherches montrent que l'immersion ne fonctionne que si la langue seconde a un statut élevé dans le milieu social, souligne Mme Snow. «Par exemple, comme à l'extérieur de Montréal, on a peu besoin de l'anglais dans la vie de tous les jours, l'immersion risque de fonctionner moins bien. C'est ironique, parce que bien évidemment, ce sont surtout ces enfants de milieux exclusivement francophones qui seront pénalisés plus tard, s'ils font une carrière ambitieuse, par la faible connaissance de l'anglais.»
Fred Genesee en est moins certain.
«À Ottawa, les classes d'immersion en français sont surtout fréquentées par les enfants des classes moyennes et aisées. Les classes normales ne sont plus fréquentées que par les enfants pauvres. Ça augmente le gouffre éducationnel. La situation pour l'immersion en anglais est sur une voie semblable au Québec.»
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