ÉTHIQUE ET POLITIQUE

Le jour de la marmotte

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Le calvaire des Libéraux ne fait que commencer

Le gouvernement Couillard devait célébrer son mi-mandat cette semaine, mais l’affaire Sam Hamad–Marc-Yvan Côté, qui suivait l’arrestation de l’ancienne ministre libérale Nathalie Normandeau, a plutôt rappelé les pires années du gouvernement Charest. Et dire que Philippe Couillard voulait enterrer une fois pour toutes ce lourd passé.

C’était le jour de la marmotte à l’Assemblée nationale jeudi. Le leader parlementaire du gouvernement, Jean-Marc Fournier, répliquant aux attaques de l’opposition qui se demandait d’où provenaient les 171 000 $ que le ministre Sam Hamad avait récoltés pour son financement politique en 2009, a ressorti la même défense qu’il opposait à ses adversaires à la fin du troisième mandat du gouvernement Charest.

Jean-Marc Fournier, qui occupait la même fonction sous Jean Charest, a ressassé le rapport Moisan de 2006 qui avait documenté le financement politique illégal du Parti québécois entre 1995 et 2000, ce financement dit sectoriel, alimenté par des prête-noms, dans lequel tant le PQ que le PLQ ont trempé, les libéraux étant toutefois beaucoup plus efficaces en la matière. Il a rabâché le nom de l’ancienne responsable péquiste du financement, Ginette Boivin, et il a reparlé d’Oxygène 9, cette firme de lobbyistes, formées de proches du PQ, qui a fait scandale en… 2002.

Pour faire bonne mesure, Jean-Marc Fournier, pour contrer l’offensive de l’opposition au sujet des ministres libéraux à 100 000 $, et même à 150 000 $ pour certains, a sorti des exemples un peu plus contemporains. Ainsi, Pierre Karl Péladeau, lors de la course à la chefferie, a récolté 100 000 $ en une seule soirée, a souligné le leader libéral, avec sa manière bien à lui de faire image, tout en mélangeant allègrement les pommes et les oranges.

Descendant de ses hauteurs olympiennes, Philippe Couillard a même participé à la foire d’empoigne, évoquant lui aussi les souvenirs du rapport Moisan et d’Oxygène 9. Pourtant, il y a deux semaines, quand François Legault a qualifié le PLQ de « parti de pourris » à la suite de l’arrestation de Nathalie Normandeau, il avait fait la leçon au chef caquiste. « Je vais le laisser seul baigner dans le caniveau. La population n’aime pas ce discours-là. La population n’aime pas la boue. Elle veut qu’on débatte d’idées, de principes, d’ambitions pour le Québec. »

Fort bien. Mais la semaine dernière à l’Assemblée nationale, on en fut quitte pour la boue.

La crise

Il faut dire que l’affaire Sam Hamad s’est transformée en une crise qui a surpris le cabinet du premier ministre. Quand le reportage de l’émission Enquête, de Radio-Canada, a révélé, jeudi de la semaine dernière, l’existence de courriels faisant état des liens entre Sam Hamad, son ami Marc-Yvan Côté et une aide financière à Premier Tech, le ministre était en Floride. C’était la relâche de Pâques. Philippe Couillard lui a demandé de revenir immédiatement.

L’entourage du premier ministre avait son plan : le ministre devait s’expliquer, ce qu’il a fait le jour de la diffusion du reportage et le lendemain, et il devait demander au commissaire à l’éthique et à la déontologie des députés de faire enquête. Philippe Couillard, laissant s’écouler une journée, annoncerait le samedi que le ministre abandonnait temporairement ses fonctions à des collègues ; pour ne pas trop accabler le brave Sam Hamad, le premier ministre lui permettrait de garder ses privilèges. Un « ministre de rien », a dénoncé l’opposition, avec salaire, garde du corps et limousine. On pensait que la proposition serait difficile à vendre à la population, mais que celle-ci elle accepterait la situation.

Le voyage

Mais voilà que Sam Hamad — il a affirmé que c’était sous le coup de la colère — décide de retourner en Floride. Un ministre payé à ne rien faire, sur qui le commissaire à l’éthique enquête et qui se prélasse en Floride, le mélange devient soudainement explosif. Qui plus est, au moment où on apprend que le ministre est en Floride, Jean Charest fait une rare apparition publique pour parler de gouvernance et de démocratie et des manifestants interrompent son discours en criant : « Charest corrompu ! » L’ancien premier ministre en profite pour défendre Nathalie Normandeau et, plus mollement, Sam Hamad. « Ça ne s’invente pas. C’était Back to the future », s’étonne encore un stratège libéral.

Pour une deuxième fois, Philippe Couillard est forcé de demander à son ministre de revenir en vitesse de Floride, d’autant plus que la plupart des députés libéraux sont estomaqués de voir, gracieuseté d’une télé américaine, leur collègue Sam, casquette sur la tête, sous le soleil floridien. Jeudi, Sam Hamad annonce qu’il redevient simple député, abandonnant son salaire de ministre.
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