Duceppe s'effondre en début de match

"La madame" ira jusqu'au bout: ça surprend, mais c'est comme ça!

GESCA déclare la guerre à Duceppe - 2012

On croirait vivre au temps des Borgia, le modèle de Machiavel pour cet ouvrage essentiel, autant décrié que pertinent, qu’est Le Prince.
Comme toujours, chacun y va de son analyse à propos des récents développements. La crise au PQ vient d’atteindre un sommet jamais inégalé. Les marchands d’armes blanches ont la cote.
Duceppe, la mi-soixantaine, vient de plier les genoux, victime d’une énième lame.
Malheureusement, les faits sont têtus concernant l’ex-chef du Bloc:
• La tentative de Duceppe a fait long feu en 2007, lorsqu’il a voulu s’imposer pour devenir chef du PQ : il a été retiré sur trois prises par Pauline Marois. Ses appuis étaient limités, paraît-il. Disons qu’il avait mal paru.
• Duceppe mord la poussière le 2 mai 2012 : une fois de plus, il est retiré sur trois prises par l’électorat, y compris par une bonne part de l’électorat souverainiste. La stratégie issue de Meech était rendue au bout du rouleau, c’est le moins qu’on puisse dire. Le Bloc vivait sur du temps emprunté et ne se maintenait à un niveau respectable que grâce aux erreurs commises par les fédéralistes.
• Duceppe rate son putch en janvier 2012: les glamour twins de la gauche du PQ – Marc Laviolette et Pierre Dubuc - sonnent l’appel à l’hallali. Échec sur toute la ligne, car les chiens, indociles, ne répondent pas. On grogne, mais en même temps, on se lèche la patte. La chasse à courre tombe à plat, la curée n’a pas lieu. Duceppe a-t-il avalisé ou commandé ce job de bras? Si c’est les cas, il a surestimé l’influence des deux inséparables. Si l’initiative vient d’eux, cela ne change rien : leur avenir, s’il y en a un, est à partir d’aujourd’hui ailleurs qu’au PQ. Vous voulez venir à bout d’un fieffé chevreuil qui bouffe vos tulipes? On vous les donne!
• Duceppe se fait torpiller et sombre dans l’abîme le 21 janvier 2012. Le héros des commandites se retrouve dans une fâcheuse position pour avoir payé les salaires d’employés du BLOC avec de l’argent dédié aux activités parlementaires. Ce n’est peut-être pas illégal, ou ce l’est. Mais avouons que ce n’était pas l’idée du siècle.

Ce dernier coup a-t-il été orchestré par un ou des fédéralistes? Peut-être, mais on se demande pourquoi l’information n’a pas été coulée avant. On aurait pu sortir ça lors d’élections fédérales précédentes, ou mieux encore, après qu’il soit devenu chef du PQ. Il n’est pas impossible que « le détenteur » de cette information ait choisi le moment présent pour agir, question d’éliminer le plus populaire des souverainistes au profit de Pauline Marois, « la madame-qui-ne-passe-pas ». Peut-être est-ce cela, peut-être pas. Pourquoi? Parce que le « crime » ne profite pas qu’aux seuls fédéralistes.
Le clan Marois serait-il à l’origine du coulage? Possible. Si c’est le cas, Pauline Marois était au courant et elle a approuvé la manœuvre, ou encore elle n’en savait strictement rien. Si elle est derrière le coup, ou si elle s’y est associée, c’est qu’elle est plus redoutable qu’on le croyait. Si elle a agi par conviction, et non pas seulement par ambition personnelle, cela mérite réflexion, qu’on soit d’accord ou pas avec elle. Mais ce n’est là que spéculation, car on ne le saura peut-être jamais.
Reste un dernier élément : Daniel Paillé a congédié en décembre ceux qui profitaient de la manne de la Chambre des communes, cette fameuse garde prétorienne de Duceppe que d’aucuns ne pouvaient plus piffer. Peut-être que le coup vient de là, mais j’en doute. Pourquoi aurait-on agi de la sorte si on avait seulement voulu nuire à Paillé? Pourquoi risquer d’étrangler le Bloc et de mettre à mal Duceppe, celui qui fut leur protecteur? Or, Paillé est dans les bonnes grâces de Marois. Il est aujourd’hui associé à l’équipe qui fera le point sur les études passées sur la souveraineté. Le mystère se tapirait-il dans l’ombre, quelque part de ce côté? Encore là, pas de preuve.
Pour revenir à Duceppe, j’estime aujourd’hui qu’il aurait dû démissionner du Bloc en 2007 pour se joindre au PQ. Il aurait été aujourd’hui en bien meilleure posture, et ce malgré ce qui a été publié dans La Presse samedi dernier. Mais il a préféré demeurer chef du Bloc. Qu’il n’ait pas compris que le Bloc allait tôt ou tard heurter un mur me laisse songeur. Manque de flair, mauvais jugement, instinct du tueur défaillant ou n’importe quoi d’autre, je ne sais pas. Était-il supérieur à madame Marois? Je ne le crois plus.
Force est de constater que madame Marois ira jusqu’au bout, que cela plaise ou non. Il semble qu’elle ait décidé de s’enligner davantage sur le « plan Larose ». Le fait qu’elle ait accepté dans ses rangs Daniel Breton, une recrue qui s’avérera difficile à brider, en est la preuve. En matière d’indépendance énergétique, le PQ ne pouvait trouver mieux. Là-dessus, je partage tout à fait l’opinion de JCPomerleau quant aux qualités de l’homme qui, entre autres, comprend très bien le rôle de l’État. Quant aux porteurs de l’indépendance « tout court », espérons qu’elle sera tout autant avisée et saura recruter ceux et celles qui sauront donner corps à un programme que plusieurs qualifient de provincialiste. Si je dis ça, c’est parce que j’ai aujourd’hui la certitude que Marois demeurera en poste. Pour le meilleur et pour le pire.
Quant aux dissidents en cavale, on verra ce qu’il en adviendra. Les Curzi, Beaudoin et Lapointe se retrouvent aujourd’hui dans une position plus inconfortable que jamais. Je crois qu’ils ne reviendront pas au PQ. C’est triste à dire, mais leur perspective d’avenir se limite à peu de chose. Quant à Aussant, il a un parti à construire. Tout balancer en l’air pour revenir au PQ n’est pas une option pour lui. Il a créé des attentes parmi de nombreux jeunes. Poursuivra-t-il, surtout s’il n’est pas élu lors de la prochaine élection? Pour ma part, Option Nationale pourrait s’avérer une force essentielle à la reconstruction d’un mouvement en crise. Tout dépend de ce qui adviendra du PQ et de la volonté des uns et des autres de s’y impliquer.
Prochaine réunion du caucus du PQ cette semaine, suivi d’un Conseil national. On verra plus clair après, mais pas pour longtemps. J’ai cru pendant quelques jours que le bateau pouvait survivre à la tempête. Or, nous apprenons qu’une nouvelle dépression pointe à l’horizon, et il apparaît qu’il y en aura une autre après celle-là. Louvoyer est à peu près tout ce que le mouvement indépendantiste – toutes tendances confondues - peut faire en ce moment. Cela dit, d’autres coups de théâtre peuvent survenir. Ce qu’on écrit sur Vigile ces jours-ci peut s’avérer caduque dans les jours qui suivent.
Vivement des élections, pour qu’on puisse ensuite reconstruire plutôt que de s’entretuer. Et si jamais un miracle surviendrait, du genre prise du pouvoir par le PQ, ou encore un PQ solidement installé comme opposition officielle, bien il ne me restera plus qu’à m’isoler pour un temps chez les moines à Saint-Benoît-du-lac pour accepter une fois pour toutes que les voies du Seigneurs sont impénétrables…


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7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    25 janvier 2012

    La fédéraste Pressda / Radio-Cadnas qui essaie de sauver le cul de la Marois en diffamant et lynchant Duceppe comme l'a fait Bouchard avec Michaud, n'est-ce pas là la meilleure des preuves que celle-ci représente un poids mort en train de couler la cause indépendantiste ???! Mais, avec ou sans Duceppe, si le néfaste étapisme de Morin-Lévesque n'est pas jeté aux orties au plus coupant, le PQ disparaîtra bel et bien ! L'affaire n'en est pas une de personnalités acceptables ou non pour le peuple québécois. Dehors les velléitaires et autres apôtres de la procrastination. Place aux courageux qui n'ont pas peur de déplaire aux anti-québécois et de se faire hair de leurs ennemis jurés.

  • Marcel Haché Répondre

    25 janvier 2012

    Je retiens que c’est Radio Tralala qui a refusé la candidature de Gilles Duceppe en poste d’analyste après la défaite historique du Bloc. Qu’ensuite, l’ombre de Gilles Duceppe a plané lourdement sur la crise péquiste. Mais que c’est Gesca (allié naturel de Rad.Can) qui a sorti la nouvelle de l’ « embarras » de l’ancien chef du Bloc.
    Gilles Duceppe est un homme honnête, qui n’a pas le meilleur flair politique. Les gens de gauche comme lui n’apprécient pas beaucoup l’idée du « flair politique », y flairant justement quelque chose qu’ils détestent : le populisme racoleur.
    Pourtant, c’est bien Jack, le plus populiste et le plus racoleur des politiciens, qui a gagné un électorat inattentif le 2 mai dernier.
    C’était à Gilles Duceppe de se rallier à Pauline Marois. L’ayant fait maintenant, il en sort grandi. Je n’en dirais pas autant de Jacques Parizeau ni de Bernard Landry.

  • Nestor Turcotte Répondre

    24 janvier 2012

    Monsieur Gendron,
    Vous n'aurez pas à vous rendre chez les moines pour méditer sur les voies imprévisibles du Seigneur. J'y vais deux ou trois fois par année, mais pour d'autres raisons
    Le peuple a déjà donné son verdict. Et préparez-vous à construire du neuf. En renouant avec le passé oublié. Le début d'un long passé où la ferveur des militants l'emportait sur les calculs monétaires.
    Nestor Turcotte

  • Yves Rancourt Répondre

    24 janvier 2012

    @ François Ricard,
    Si je comprends bien votre raisonnement, vous vous fiez à ce sondage de CROP pour conclure que le PQ va en manger toute une? Cette même maison de sondage qui, il y a à peine un mois, prédisait 100 comtés à François Legault et la CAQ! Même si je ne gagerais pas ma chemise sur le PQ pour les prochaines élections, je crois personnellement que rien n'est joué. Le dernier Léger donnait 25% du vote au PQ( 31% chez les francophones), et ce dans un contexte où la CAQ perd progressivement du terrain. Elle serait maintenant autour de 30%. Ce sondage nous démontre en plus que le premier choix des électeurs de la CAQ, après ce parti, est le PQ; c'est donc le PQ qui profiterait le plus des déboires de la CAQ. Quant à Pauline Marois, rappelez-vous que le même Léger montrait qu'elle apparaissait aux yeux des Québécois comme étant la plus intègre des chefs et celle la plus préoccupée par les intérêts des citoyens, et ce de façon très marquée.
    Tout ceci pour conclure que, si l'électorat votait plus avec sa raison qu'avec son coeur au prochain scrutin, il ne faudrait pas se surprendre que madame Marois et le PQ reçoivent beaucoup plus d'appuis que certains ne le prédisent présentement.
    Salutations.

  • Archives de Vigile Répondre

    24 janvier 2012

    Merci, monsieur Gendron pour ce texte engagé, c'est-à-dire qui prend intellectuellement parti, inspiré non par des intérêts particuliers mais par des convictions honnêtes sur la nature du bien général.
    Il suffit aujourd'hui, ici comme partout au monde, d'être probe pour être révolutionnaire.
    Pauline Marois l'est. Vous l'êtes, monsieur Gendron.
    En toute solidarité,
    Andrée Ferretti.

  • François Ricard Répondre

    24 janvier 2012

    Mme Marois ne reçoit que 11% d'approbation de l'électorat.
    C'est toute un dégelée en perspective.
    Ne serait-il pas possible de faire quelque chose?

  • Archives de Vigile Répondre

    24 janvier 2012

    La lettre suivante va un peu dans le même sens:
    http://www.cyberpresse.ca/debats/opinions/201201/23/01-4488629-une-femme-dexception.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B13b_opinions_652_section_POS2
    La presse, le 24 janvier