Le référendum populaire concernant la mosquée de la rue Legendre a fait grand bruit dans les médias ces derniers jours. En tant que membres du comité citoyen, nous tenons à rétablir les faits, et à fournir notre éclairage, bien différent de celui diffusé par les médias.
Il s'agit d'une demande de dérogation au zonage pour permettre à un centre culturel établi illégalement depuis deux ans de devenir une mosquée, sur une rue commerciale d'Ahuntsic. Installé dans un ancien restaurant, ce centre culturel servait de salle de prière. Après dénonciation, les responsables ont été forcés de demander une dérogation au règlement de zonage. Malgré une très vive opposition des citoyens à l'assemblée du conseil municipal de septembre 2015, à cause de réels problèmes de stationnement dans le secteur et de privilèges dont semblaient bénéficier certains citoyens, les élus municipaux ont entériné la dérogation. Notre seul recours était la tenue d'un référendum, qui a eu lieu dimanche 5 juin 2016 et a mené à la victoire du «non». Comme l'a indiqué Pierre Desrochers, conseillé du district Saint-Sulpice, «l'exercice démocratique s'est tenu dans les règles de l'art».
Aller au-delà du salissage
Depuis ce «non», voilà que les médias se sont acharnés à nous discréditer, voire à nous diaboliser. Nous sommes affublés de tous les maux: islamophobie, paranoïa, irrationalité, intolérance, mesquinerie, «meneurs de claques» selon les termes de Lise Ravary. «L'islamophobie a gagné» est la première phrase de l'article d'Hugo Duchaine dans le Journal de Montréal. On prête aux citoyens des intentions qui seraient autres que celles évoquées. Dans un article de Judith Lussier intitulé «La peur a parlé», on parle d'exclusion des minorités, d'un référendum qui a «soumis le sort d'une minorité stigmatisée à la volonté d'une majorité insécure». Les alertes au racisme sont lancées, et Haroun Bouazzi, d'AMAL Québec, en profite pour justifier sa demande de commission d'enquête sur le racisme systémique. M. Bouazzi parle même de dictature de la majorité sur la minorité musulmane, et même d'hystérie honteuse à l'encontre du culte musulman.
En fait, il s'agit, ni plus ni moins, d'une demande d'accommodement religieux, qui n'a pas passé le test de l'acceptabilité sociale. Devrons-nous l'enfoncer de force dans la gorge des résidents? Des demandes semblables de dérogation en zone commerciale avaient été demandées et refusées dans notre quartier pour des églises, comme ce fut le cas de l'Église évangélique Mont de Sion qui s'est rendue en cour supérieure et de deux autres cas d'églises qui ont été également refusés. Pourquoi alors l'accepter pour une mosquée? Comme l'a souligné le conseiller municipal M. Desrochers, les responsables de la mosquée sont simplement appelés à trouver un emplacement pour leur salle de prière «dans un secteur de l'arrondissement qui le permet de plein droit».
La non-objectivité journalistique et le parti-pris pour le camp du «oui» est flagrant. Aucun journaliste n'a, par exemple, daigné rapporter le fait que toutes les affiches électorales en faveur du «non», soit 150 en tout, aient été arrachées aussitôt que posées, un geste parfaitement illégal.
Rétablissons les faits
Le plus scandaleux pour nous, ce sont ces insinuations, plus ou moins explicites que ce référendum serait une preuve de stigmatisation d'une minorité par la majorité. Mais de quelle minorité et de quelle majorité parle-t-on au juste, alors que l'arrondissement d'Ahuntsic-Cartierville compte une trentaine de groupes culturels, des Italiens aux Polonais, en passant par les Chinois, les Vietnamiens, les Haïtiens, les Indiens ou les Pakistanais?
Le dépouillement des bulletins de votation révèle une tout autre réalité qu'un affrontement entre musulmans et majorité québécoise «de souche». Sur les 1117 personnes du quartier St-Sulpice inscrites sur la liste électorale, la participation au référendum a été de 43%, soit 486 votants. Nous avons relevé un grand total de 123 noms francophones d'origine québécoise inscrits sur la liste, dont seulement 34 sont allés voter, soit 7% des votants. Pour avoir un portrait plus complet, nous avons également comptabilisé les noms à consonance arabe. Sur 126 inscrits, 81 sont allés voter, soit 17 % des votants. En d'autres termes, 76% des votants sont d'origines diverses, en dehors des deux catégories précédentes.
Comment peut-on alors parler de majorité ayant voté contre la minorité? Même si tous les Québécois dits de souche avaient voté «non», ce ne sont pas eux qui auraient pu faire basculer l'issue du scrutin. En fait, aucun groupe culturel n'a pu faire fléchir, à lui seul, le résultat du vote. Peut-on alors suggérer aux chroniqueurs et autres «journalistes» que la vision d'une majorité qui opprime une minorité n'a tout simplement aucun fondement?
À qui profite la désinformation?
Comment se fait-il qu'une initiative citoyenne pour refuser un changement de zonage soulève autant de passion de la part des médias et fasse l'unanimité contre elle? Comment se fait-il que les résidents soient ainsi pointés du doigt, qu'on leur prête des intentions malsaines, «laides» selon le terme même utilisé par Lise Ravary dans sa chronique? Serait-ce pour se donner bonne conscience, une occasion de se blanchir sur le dos des citoyens? Voilà, nous avons identifié les racistes, les islamophobes, et ce n'est pas nous. Certains y ont même trouvé l'occasion de justifier l'appel à une commission d'enquête sur le racisme systémique au Québec. Force est de constater que ces gens ne savent pas de quoi ils parlent. La diabolisation de citoyens ayant voté «non» pour diverses motivations est apparemment fort utile pour les intérêts politiques et médiatiques des uns et des autres.
Au-delà de l'incompréhension et du mépris face à notre action, nous déplorons tout particulièrement cette campagne de désinformation qui divise les résidents, fait croire à une animosité entre majorité et minorité et nourrit l'hostilité entre les Québécois de diverses origines. Nous espérons que nos chiffres auront aidé à rétablir les faits et à aller au-delà de la rectitude et des intérêts politiques.
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