Un rapatriement souhaitable

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À notre tour de rapatrier !

PIERRE PAQUETTE
Professeur d'économie au Collège de Maisonneuve, l'auteur a été député du Bloc québécois. Il collabore régulièrement à la section Débats.
La manifestation qui a eu lieu à Montréal samedi dernier montre que le saccage de l'assurance-emploi par les conservateurs ne passe pas au Québec. Ils imposent une réforme inacceptable en s'attaquent directement aux travailleurs des industries saisonnières, en mettant fin aux projets pilotes, en abolissant les conseils arbitraux et en imposant une nouvelle règle sur les gains admissibles qui va pénaliser beaucoup de travailleurs.
À cause de sa structure industrielle, 40% des chômeurs saisonniers au Canada sont Québécois. Cette réforme est carrément une attaque contre le Québec et le gouvernement Marois a eu raison de mettre sur pied la commission nationale d'examen de la réforme de l'assurance-emploi.
C'est le quatrième resserrement des règles effectué par le fédéral depuis 1990. Celui-ci n'assume plus ses responsabilités. Le régime d'assurance-emploi est devenu arbitraire, complexe et inéquitable. Il est temps que le Québec envisage sérieusement son rapatriement.
Mais il n'y a pas que les réductions de couverture qui plaident pour ce projet. Il y a aussi que l'avenir du régime s'annonce encore plus sombre. Le gouvernement canadien utilise désormais le programme d'assurance-emploi comme outil pour sa stratégie industrielle axée sur l'automobile et les hydrocarbures. Il est clair qu'un des objectifs de la réforme conservatrice, c'est d'aider l'industrie pétrolière à combler ses pénuries de main-d'oeuvre. Cela veut dire que le régime va être de plus en plus pensé en fonction de l'Ouest et de moins en moins en fonction des besoins du Québec.
Parmi les raisons de rapatrier cette compétence, il y a aussi la nécessité d'articuler de façon intelligente les mesures actives de main-d'oeuvre (l'aide à la préparation, à l'insertion et au maintien en emploi) avec les mesures de soutien du revenu pour se doter d'une véritable politique d'emploi. De toute évidence, une telle politique ne pourra donner tous ses résultats si Québec ne maîtrise pas tous les outils pertinents, notamment l'assurance-emploi.
Cette duplication de responsabilité est aussi un frein à l'innovation des politiques sociales. Il a fallu 30 ans de négociation pour transférer la majeure partie des mesures de formation professionnelle à Québec et 10 ans de pourparlers pour les congés parentaux. Imaginez le reste aujourd'hui.
L'idée de rapatrier l'assurance-emploi est présente dans le débat public depuis longtemps. Le livre beige du PLQ de Claude Ryan l'incluait. L'ADQ l'avait dans son programme et le PQ l'a adopté lors de son dernier congrès comme le Bloc à son dernier conseil général. Beaucoup d'organisations syndicales et de défense des personnes en chômage comme le Conseil national des chômeurs en font la promotion.
Un accord administratif entre les deux gouvernements permettrait au Québec de se retirer du programme fédéral et de mettre en place son propre régime. Quant au financement, Michel Bédard, ancien actuaire en chef du Programme considère que «la province peut se payer un régime amélioré, aux coûts à peu près équivalent à ceux du régime actuel».
Le débat doit s'élargir et s'approfondir. Un tel projet doit soulever l'enthousiasme et l'adhésion du plus grand nombre au Québec pour devenir réalité. La présence de la Commission nationale d'examen de la réforme de l'assurance-emploi dans toutes les régions du Québec à l'automne sera une belle occasion de le faire, une occasion à ne pas rater.


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