Un simple accessoire

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Le gouvernement Couillard a renoncé à intégrer les immigrants

À voir le premier ministre Couillard s’opposer avec une aussi étonnante vigueur à l’exploitation des hydrocarbures de l’île Anticosti, on se surprend à penser que le jour où le développement économique sera réellement conditionnel à la protection de l’environnement n’est peut-être pas si lointain.

On aimerait sentir le même souci pour la protection du français quand elle est mise en balance avec les exigences de la croissance économique qui, après deux ans d’assainissement des finances publiques, deviendra la grande priorité du gouvernement, ce qui impliquera de faire des choix, notamment en matière d’immigration.

Les audiences de la commission parlementaire qui étudie depuis une semaine le projet de loi 77 sur l’immigration illustrent très bien le dilemme que pose la conciliation des besoins en main-d’oeuvre des entreprises, qui vont aller en augmentant, avec les mesures qu’exige la fragilité grandissante du français dans les milieux de travail.

Les représentants des entreprises ne nient pas la nécessité d’un plus grand effort de francisation, mais ce n’est clairement pas leur priorité. « Les entrepreneurs que je rencontre préfèrent avoir des gens qui ne parlent pas français, mais qui sont des travailleurs spécialisés qu’on met tout de suite en usine », a expliqué le président des Manufacturiers et Exportateurs du Québec, Éric Tétrault.

« Le Québec fait face à une urgence économique qui est au moins aussi importante que la promotion du français », a-t-il ajouté. C’est ce qu’on semble aussi penser au gouvernement, qui n’a jamais donné l’impression de trouver la situation du français particulièrement préoccupante, comme si cela relevait simplement de l’accessoire.

La Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), dont le président, Michel Leblanc, a clairement exprimé son préjugé favorable envers le bilinguisme au sein des entreprises, voudrait être consultée sur la pondération des critères de sélection des candidats à l’immigration pour qu’ils correspondent davantage aux impératifs du marché du travail.

« Le critère de langue constitue un exemple de l’inadéquation entre les critères de la grille de sélection et la réalité des entreprises, explique la Chambre dans son mémoire. Bien que la valeur accordée à la maîtrise du français doive demeurer élevée, celle-ci ne doit pas faire sorte qu’on se prive des travailleurs immigrants qui détiennent les qualifications et compétences recherchées par les travailleurs de la région ». Autrement dit, l’importance relative accordée à la connaissance du français doit diminuer pour accueillir des travailleurs spécialisés qui ne le parlent pas.

Les entreprises ne sont pas les seules à se plaindre. Les universités anglaises, notamment McGill, déplorent également la difficulté de recruter des professeurs renommés, qui sont réticents à suivre les cours qui leur permettraient d’acquérir une connaissance suffisante du français.

Sensible à ces représentations, le gouvernement Couillard a déjà modifié les critères de sélection en décembre 2014, de manière à diminuer le poids relatif du français exigé des immigrants qui font une demande de résidence permanente, que le gouvernement Marois avait haussé l’année précédente. Apparemment, cela est encore insuffisant.

La loi 101 visait à imposer le droit de travailler en français. Trente-neuf ans plus tard, c’est le droit de ne pas travailler en français qui est en voie de s’imposer. La semaine dernière, Le Devoir rapportait que 60 % des immigrants qui débarquent au Québec sans connaître le français boudent les cours de francisation qui leur sont offerts gratuitement par l’État, alors que cette proportion était de 40 % en 2008.

Selon le président des Manufacturiers et Exportateurs du Québec, il serait plus efficace de confier aux entreprises le soin de franciser leurs employés sur le tas. Cela reste à voir. Si la connaissance du français n’est même pas une condition d’embauche, pourquoi un travailleur souhaiterait-il davantage l’apprendre ?

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