Commission Charbonneau: on n'a encore rien vu, dit Duchesneau

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À ce sujet au moins, il sait de quoi il parle

(Québec) Jacques Duchesneau s'est heurté au scepticisme général l'an dernier, lorsqu'il a déclaré devant la commission Charbonneau que 70 % du financement des partis politiques était de «l'argent sale» et provenait de dons recueillis illégalement. Il avait raison.
Un an plus tard, l'auteur du rapport Duchesneau, élu député le 4 septembre, affirme qu'on n'a encore rien vu. Le pire est à venir à l'automne, avec l'étude des liens entre le financement du PLQ et du PQ, et l'octroi des contrats gouvernementaux.
«Moi, j'ai hâte qu'on commence à nous parler du financement sectoriel. Il y a de gros noms qui vont sortir, a déclaré M. Duchesneau en entrevue au Soleil. Ce qu'on a vu au municipal n'est qu'un pâle reflet de ce qu'on verra au provincial.»
Le député prédit qu'on verra là aussi des gens en position qui se sont enrichis à l'échelle provinciale. «Mais ce qu'on va voir, c'est une entrée d'argent massive au niveau de la préparation des élections. Ce que le provincial va nous montrer, c'est comment on en est venu à déjouer les vrais principes fondamentaux de la démocratie. Les partis ne se sont pas battus à forces égales, parce qu'il y en a qui sont allés chercher de l'argent de façon illégale.»
Jacques Duchesneau espère que la commission Charbonneau aura le temps d'aller au fond des choses, et il lance une mise en garde: «Si on ne fait pas le tour de cette question-là, on n'aura pas une deuxième chance, on ne pourra pas y revenir pendant un bon bout de temps.»
Malgré ce qu'on a vu au municipal, Duchesneau fait remarquer que ce n'est pas là que se trouvent les gros contrats. «C'est au ministère des Transports et à Hydro-Québec que les gros contrats se donnent et où on verra le "pull et non le push". Ce ne sont pas les entrepreneurs qui poussent vers le haut, mais c'est le haut qui demande de l'argent. C'est ça, au niveau provincial.»
Des preuves sur vidéo
Selon lui, c'est la raison pour laquelle l'avocate du PQ, Me Estelle Tremblay, a été tellement cinglante à son endroit pendant son contre-interrogatoire devant la commission Charbonneau. «Les procureurs de la commission Charbonneau voulaient que je mette la table pour l'automne, pour les témoins qui viendraient confirmer ce que j'allais dire. Ça a rendu la procureure du PQ très nerveuse, parce qu'elle voulait savoir si j'avais des noms. Moi, je sais pourquoi elle était nerveuse...»
Il explique que s'il a été aussi catégorique devant la commission, c'est parce que ses informations étaient «basées sur des rencontres que j'avais eues et que j'avais filmées».
Le député déplore par ailleurs que la loi 1 du gouvernement Marois ne punisse que les entreprises qui ont admis leurs fautes devant la commission Charbonneau, alors que celles qui n'ont rien dit risquent de s'en sortir. «Ce qu'on vise actuellement, c'est uniquement les gens qui ont eu, entre guillemets, le courage de venir avouer leurs torts. Il y en a qui n'ont pas parlé, que je connais. Je crois à la justice, mais à la justice pour tous. Là, on ne l'a pas, et ça va faire mal à des compagnies parce qu'elles se sont mises à table.»
Selon lui, l'attitude actuelle du gouvernement aura pour effet de dissuader les autres à «ouvrir leur sac» devant la commission. «J'ai la certitude qu'il y a des gens qui vont juste passer à travers tout ça.»
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Pénible d'être la deuxième opposition

Malgré les scandales révélés à la commission Charbonneau, Jacques Duchesneau n'est pas désabusé de la politique, même s'il admet certaines frustrations. «Je trouve ça pénible d'être la deuxième opposition. Parce que même si on apporte des projets de loi, on n'est pas capable de les faire avancer.»
Selon lui, le message de la Coalition avenir Québec est un peu trop technique. «Le projet Saint-Laurent, par exemple, c'est vraiment un projet du futur. On va publier un livre à l'automne. Ça, c'est bien beau. Mais est-ce que monsieur et madame Tout-le-Monde est capable d'en comprendre les subtilités? Non!»
Le député admet qu'il lui arrive également d'être «trop technique» dans ses explications. «C'est peut-être le message qui devrait changer. On devrait faire rêver les gens et dire qu'on va changer ce pays-là et qu'il y aura de meilleurs emplois, sans entrer dans des éléments techniques où les gens ne suivent pas.»
«C'est regrettable»
Nouveau venu sur la scène provinciale, Jacques Duchesneau déplore les contraintes de la politique partisane. Il dit avoir développé un grand respect pour des gens qui sont au PQ, au PLQ et à Québec solidaire. «C'est regrettable que les lignes de parti ne permettent pas de faire des alliances.» Il n'aime pas l'animosité qu'il dit percevoir entre libéraux et péquistes: «C'est comme viscéral, c'est personnel, les gens ne se parlent plus. Quand j'ai un moment de déprime, je me ferme les yeux et je me dis que si on pouvait prendre des gens dans les trois ou quatre partis et administrer le Québec pendant cinq ans, l'équipe Québec pourrait affronter n'importe quelle autre équipe».
Il reconnaît qu'il lui faudra critiquer ses adversaires politiques aux prochaines élections, mais il compte s'en tenir aux idées et ne pas s'en prendre aux personnes. «J'ai eu ce débat-là avec ma femme en fin de semaine et je n'ai pas le goût d'embarquer dans cette game-là.»


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