Dégel : un premier pas

Université - démocratisation, gouvernance et financement

Il y a de ces promesses électorales qui ne s'empoussièrent pas longtemps sur les tablettes gouvernementales. Ainsi en est-il de cet engagement des libéraux de piger 100 $ de plus par année dans la poche des étudiants universitaires.
Une semaine après son entrée en poste comme capitaine du grand navire de l'Éducation, la ministre Michelle Courchesne promet qu'elle ira de l'avant dès septembre avec le dégel des droits de scolarité. En exigeant 50 $ de plus par semestre pendant cinq ans, elle ajoutera à terme 100 millions dans la cagnotte des universités affamées.
Pour ces établissements, qui affichent ensemble un déficit cumulé de près de 250 millions et qui réclament l'ajout de 400 millions récurrents à leur base de financement, voilà une bouffée d'oxygène destinée à reprendre le souffle perdu. Mais la course est loin d'être terminée.
Arrivé en sauveur aux rênes de l'Éducation, Jean-Marc Fournier s'était initié aux joies, mystères, caprices et fredaines du réseau en affrontant une jungle d'étudiants outrés par la conversion de bourses en prêts. Mme Courchesne ne se frottera pas au même type de courroux généralisé, mais si le dégel n'est pas assorti d'une garantie de réinvestissement, c'est peut-être à la grogne des recteurs qu'elle goûtera.
Ceux-ci en ont déjà un peu en travers de la gorge pour vociférer leur mécontentement, mais ce n'est pas dans leur culture de cracher sur la main qui les nourrit. Les transferts fédéraux consentis par Ottawa n'atteindront finalement que 800 millions pour le Canada entier, contre les 2,2 milliards espérés. Décevant, le dernier budget du Québec n'a pas livré les fruits attendus. Et la gifle ultime: Jean Charest a promis de diminuer les impôts.
En privé, les recteurs ont hurlé leur rage. Quoi? Après des mois d'un discours favorable aux doléances universitaires, le premier ministre Charest s'empressait de répandre les gains du déséquilibre fiscal dans la cour des particuliers? En public toutefois, ils ont ravalé.
L'idée de dégeler ces droits fixés depuis 1994 aux mêmes 1668 $ par année les rassemble désormais presque tous. Même le réseau de l'Université du Québec, qui avait pourtant toujours refusé de confesser un penchant pour la fin du gel, se rallierait à cette option, malgré quelques dissidences.
Le dégel, devenu nécessaire, ne peut pas mettre fin au sous-financement chronique des universités. Pendant que le Québec rouvre les vannes, les autres provinces, elles, continuent d'augmenter leurs droits! Impossible alors de parler de vrai rattrapage.
C'est donc un baume sur les plaies des universités, certes. Mais il ne soulage pas tous ces grands besoins: les bibliothèques dégarnies, les toits qui coulent et, surtout, les professeurs à embaucher à des conditions équivalentes à celles des universités de la planète, là où la valse de la concurrence se danse désormais.
Avant de passer en mode électoral, le gouvernement avait commandé une série d'études, dont une sur l'impact de scénarios modulant les droits de scolarité. Ces réflexions sont toujours attendues, mais Québec a préféré procéder avant de connaître leurs conclusions.
On ne sait donc pas dans quel grand plan directeur atterrit le dégel. Si le régime de prêts et bourses garantira le maintien de l'accessibilité. Si on ajoutera à la base des universités plus que ce que les étudiants y apporteront. Si d'autres voies seront étudiées, comme les droits différenciés, l'apport des étudiants étrangers ou la participation du secteur privé.
On peut piger les promesses électorales qui nous conviennent. En plus du dégel des droits de scolarité, les libéraux ont tendu dans leur plateforme un milliard de dollars de plus en appât pour le postsecondaire. À quand la réalisation de cette promesse? Les paris sont ouverts.


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